DAMIEN VEUT CHANGER LE MONDE
Une jolie comédie sur la solidarité
Un surveillant d’école plein de bonne volonté propose d’aider un élève et sa mère, originaires de Syrie, et sur le point d’être expulsés. Acceptant de reconnaître l’enfant, il leur permet d’obtenir leur titre de séjour. Mais le lendemain, apprenant son geste, d’autres mères de différentes origines frappent à sa porte, lui demandant de reconnaître aussi leurs enfants…
La première scène du film déstabilise un peu. Après s’être fait plaqué au soleil par des policiers, Damien entame en voix-off son propre portrait et celui de ses parents militants, avant d’en venir au « pourquoi » de cette situation. Filmé en plan zénithal, une fois le coup asséné par un policier, ce ko de l’acteur principal ne fleure pas le réalisme, le fait que Franck Gastambide reste au sol et les policiers autour sans le toucher n’étant pas des masses crédible. Mais rapidement plongés dans quelques images amusantes évoquant les actes engagés de ses parents (ah le déguisement en viande « emballée » pour protester contre les abattoirs !), l’humour prend le dessus et donne le ton de cette comédie potache aux tonalités politiques.
Partant d’une intention d’aider frôlant la naïveté, le scénario se centre sur son sympathique personnage principal, et prend peu à peu de l’ampleur, traitant des moteurs de la colère et finalement d’une forme de « délit de solidarité », souvent condamné par la justice. Le concept développé ici, mâtiné d’un soupçon d’omissions, entraîne naturellement des malentendus et des situations rocambolesques qui font de "Damien veut changer le monde" un comédie réussie. Mais au-delà de l’humour, le film provoque une vraie émotion, et même s’il en fait un peu trop sur la fin, questionne aussi sur la générosité de chacun (cotisations trop faciles sur internet, démultiplication des causes à défendre, limites de l’implication de chacun…).
Mais ce qui fait avant tout la richesse et la réussite de cette comédie, ce sont à la fois ses interprètes (Franck Gastambide est délicieusement attachant dans ce rôle un peu à part dans sa carrière, et Melisa Sözen, actrice turque vue dans "Winter Sleep" est extrêmement juste et touchante), mais surtout la qualité d’écriture des personnages secondaires. De la sœur avocate apparemment sans cœur (Camille Lellouche, irrésistible, à la fois odieuse et insensible) au père dépassé par les événements (Patrick Chesnais, goguenard), en passant par le pote entraîneur (Gringe), celui chauffeur (Youssef Hajdi) ou les différents « pères » embringués dans cette histoire aux accents militants, tous séduisent et provoquent un tendre sourire. Au final, "Damien veut changer le monde" se révèle être une comédie attachante, dont la petite musique romantique se marie très bien avec son rude sujet de fond : les expulsions de sans papiers.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur