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CONTAGION

Un film de Steven Soderbergh

Steven Soderbergh s'offre un casting quatre étoiles pour un suspense bien tiède

Dans plusieurs villes, des cas de morts inexpliquées apparaissent. Des personnes sont atteinte d’une forte toux et d’une fièvre aiguë, provoquant leur mort en quelques jours. Le CDC (Center for disease control – centre de contrôle des maladies) est sur le pied de guerre…

Le film s'ouvre sur un écran noir. En fond sonore, l'on peut entendre un bruit de toux qui résonne. Tout petit symptôme peut précéder un grand malheur. Et Steven Soderbergh d'enchaîner avec un nouveau film catastrophe, autopsie clinique et détaillée d'un processus qui s'enclencherait « dans le cas où ». Il faut dire que depuis des années de nombreux scientifiques semblent d'accord : malgré la fausse alerte du virus H1N1, un jour surgira une grande épidémie, à échelle mondiale, qu'il sera difficile d'enrayer. Et peu importe d'où elle viendra, peut importe qui sera le premier à tousser.

Alternant avec régularité petits films expérimentaux et grosses productions hollywoodiennes, Steven Soderbergh nous invite donc aux premières loges de son phénomène de « Contagion ». Un film qui navigue quelque part entre les deux, se refusant à tout excès sensationnaliste (comme pour un « 28 jours plus tard »...), mais affichant un impressionnant casting, composé entre autres de Kate Winslet, Gwineth Paltrow, Matt Damon, Laurence Fishburne, Jude Law, Marion Cotillard...

Steven Soderbergh et son scénariste ont donc choisi la voie du réalisme, décortiquant les rouages de la lutte, à échelle internationale, visant à éradiquer un mystérieux virus et à en trouver le remède le plus rapidement possible. Refusant d'adopter un réel point de vue, ou de privilégier un personnage en particulier (après tout, ne sommes-nous pas tous égaux face à la maladie?), se pose une série de problèmes. Le premier est qu'un tel sujet aurait mérité en soi bien plus qu'un simple film d'une heure quarante cinq. Du coup, on a l'impression que chaque élément du puzzle, embrassant meintes dimensions humaines, est sacrifié au plus vite : de par son décès, pour Kate Winslet ou Gwineth Paltrow, ou de par une disparition pratique du récit, pour Marion Cotillard. Les personnages semblent dont à peine esquissés, et ne peuvent créer l'empathie nécessaire à ce genre d'histoire.

Certes le catalogue est complet : de la quête de la souche du virus aux recherches et tests pour un vaccin, de la poursuite du patient 0 aux estimations du nombre de cas, des intérêts des labos pharmaceutiques aux enjeux politiques et personnels, des problèmes de hiérarchisation de la distribution de l'antidote aux évacuations, rien n'est laissé de côté. Même les pires hypothèses sont envisagées, revêtant une apparence de réalisme probable (l'usage d'une loterie pour l'attribution des vaccins, la répartition de placebos pour donner l'impression d'une distribution plus rapide. Mais, et c'est là le deuxième problème, chaque sujet semble traité avec une telle vitesse qu'il semble à peine évoqué, les personnages défilant aussi vite que les problèmes et solutions envisagées.

C'est sûrement là ce qui empêche « Contagion » de provoquer une réelle émotion, hormis lors d'une miraculeuse scène finale, lorsque Matt Damon regarde une photo de sa femme, laissant s'effondrer la tension. Du coup, le spectateur sera plus attentif aux agissements du seul véritable trouble fête de l'histoire, le blogueur Jude Law, personnage ambiguë, opportuniste persuadé par sa propre paranoïa s'étant inventé son remède miracle, et fabriqué son scaphandre gonflable. Il faut dire qu'il suit de très près les agissements des autorités, publiant sans relâche, sous la critique des politiques qui affirment que « blogging is not writing, it's graffiti with ponctuation » (le blog ce n'est pas de de l'écriture, c'est du graffiti avec de la ponctuation). Mais le déséquilibre se ressent très vite, laissant le spectateur face à une multitude de petites histoires. Dommage, car dans le fond, « Contagion » est un film qui enjoint à retrouver le goût de la solidarité, chose dont on aurait bien besoin en ces temps de crise et de pessimisme généralisé. De là à voir un parallèle entre le virus du film et les spéculations boursières actuelles ?

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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