LES CONQUÉRANTS
N'est pas Indiana Jones qui veut...
« La malchance, c'est un truc, faut le prendre très calmement. » Dixit Gaalad, looser de profession, qui entraîne son demi-frère Noé dans une quête improbable visant à rompre une malédiction que leur aurait transmis leur père, les rendant fatalement malchanceux. Ce n'est pas un Graal à dénicher mais au contraire à restituer qui leur permettrait d'arriver à leurs fins. Une sorte d'"Indiana Jones" à l'envers (dont les influences sont joyeusement assumées) qui permettra aux deux frères de se retrouver dans l'adversité qui les entoure. Le seul obstacle à leur quête, qui est aussi l'histoire de leurs vies respectives, est finalement la lutte contre une société qui les asphyxie. Car Gaalad et Noé sont surtout deux hommes seuls que chaque sphère de la société rejette : qu'il s'agisse de la famille, des amis ou petites amies, du monde professionnel ou du simple voisinage, personne ne veut d'eux.
Cette forme de chronique sociale assez sombre qui était la pierre de voûte de "8 fois debout" (le premier film de Xabi Molia) est ici traitée avec légèreté. L'individu rejeté qu'incarne notre duo de bras cassés devient encore plus fantaisiste quand une dimension fantastique fait littéralement déraper le récit. Si le « Graal », sacré s'il en est, pouvait déployer sans peine son potentiel magique dans un univers spielbergien, il provoque ici un décalage tel qu'un risque de décrochage du spectateur semble inévitable. Un peu comme si un héros des frères Dardennes se révélait soudain être Superman, vous voyez ?
Passé cette envolée fantaisiste (de trop ?), le film tient ses promesses grâce à des dialogues ciselés, deux acteurs qui parviennent à enthousiasmer par leur morosité (ce n'est pas si facile d'incarner un paumé..) et une mise en scène qui oscille habilement entre farce et tendresse. Si la malchance est un truc à prendre calmement, "Les Conquérants" est lui un truc à prendre avec beaucoup de délectation...
Rémi GeoffroyEnvoyer un message au rédacteur