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LA COMMUNAUTÉ

Un film de Thomas Vinterberg

Derrière les apparences

Un couple danois vient d'hériter d'une maison de plus de 450 m2. Désireux de garder celle-ci, et face à l'importance des charges, ils décident de convier d'autres personnes à y vivre. Ce sont d'abord des amis, puis des inconnus, qui intègrent ainsi la « communauté », dont les règles vont bientôt devoir être écrites...

Démarrant à la manière d'une comédie plutôt légère, avec l'audition (sur fond rock) des futurs occupants permettant de poser sommairement le caractère et les défauts des personnages (le pote fauché, le couple traumatisé par la maladie de leur enfant, la chieuse, l'immigré accablé...) tout comme les enjeux de chacun vis à vis de la cohabitation, le nouveau film de Thomas Vinterberg ("Festen" et "La chasse") vire progressivement à la comédie de mœurs pleine de complicités et de règlements de comptes, alors que la fille du personnage principal découvre que celui-ci a une liaison avec une de ses étudiantes.

Avec un charme désuet, c'est ainsi à l'utopie d'un idéal de vie collective que s'attaque l'auteur, au travers d'un scénario qui s'intéresse moins aux degrés de tolérance de chacun, qu'aux conséquences de la liaison du mari au sein de la maison. Doté d'un impressionnant casting, "La communauté" capte ainsi l'air du temps des années 70, entre humeur post-soixante-huitarde et émergence de divers modèles de familles recomposées. Autour de la formidable Trine Dyrholm (Prix d'interprétation féminine au Festival de Berlin 2016 pour ce rôle), en femme bafouée dont les idéaux vacillent et la dignité de façade se fissure peu à peu, c'est aussi la différence entre hommes et femmes face au vécu amoureux et au vieillissement, que le film met en évidence.

À l'aide d'une caméra portée, en perpétuel mouvement, l'auteur capte les pincements de lèvres, les regards embués, les sourires de convenance, révélant au delà des visages, les tourments de personnages impliqués directement ou non dans une histoire d'amour à trois. À la fois drôle et grave, le film est sans conteste l'un des plus aboutis de son auteur, alliant qualité de la reconstitution, brillante direction d'acteurs, scènes chocs aux dialogues maîtrisés et à la puissance émotionnelle incontestable, et capacité à éviter tous les virages attendus. Offrant ainsi un habile final, à la cruelle double parabole, il s'agit là d'un des premiers événements de cette année cinéma 2017.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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