COMANDANTE
Un film de guerre laborieux, malgré quelques reconstitutions intéressantes
Fin septembre 1940, au lieu d’accepter une pension pour invalidité, le commandant Salvatore Todaro prend la tête d’un sous-marin de la marine royale italienne, le Cappellini, en partance pour l’Atlantique. Quelques jours plus tard, après avoir passé Gibraltar, son équipage se retrouve sous le feu d’un navire marchand belge, alors supposé neutre…
Film d’ouverture du Festival de Venise, "Comandante" n’aura pas convaincu grand monde. Plutôt crépusculaire, à l’image peut être d’une certaine vision de la Marine, où les règles de ceux qui naviguent l’emportent sur celles de la guerre, le métrage réussit ponctuellement à reconstituer des moments de bataille ou de tension (le passage des mines à Gibraltar, le bombardement par un avion ennemi, le face à face avec un navire britannique…), utilisant le flou pour mieux suggérer l’aspect furtif de l’engin ou son isolement dans des lieux hostiles, et jouant sur la nuit et les coloris sombres pour mieux perdre les hommes dans une mer qui les dépasse. Mais le choix de faire une énorme place au discours, prenant d’emblée le pas sur l’action véritable, sans pour autant permettre de réellement approfondir les personnages (le commandant, le cuistot, les femmes restées au port, le capitaine belge…), ne fera que plomber l’ensemble du récit.
En insistant lourdement sur l’aspect humain des marins, histoire notamment de mettre l’idéologie fasciste au second voire troisième plan, Edoardo De Angelis saborde lui-même cet intéressant fait divers, qui démarrait sur un plan marquant en caméra subjective montrant les pieds d'un parachutiste s'écrasant en mer. Les passages obligés, discours d’embarquement pour motiver les troupes, ou échange viril sur les trous du culs de poulets, sont particulièrement longuets. Les voix-off ponctuelles, qu’il s’agisse de celle de la femme du cuistot exprimant son désarroi, ou du plongeur, ne font que doubler inutilement soit le jeu de l’interprète, soit l’action elle-même. La voix-off du commandant, livrant des réflexions au travers de ses lettres, achève de ralentir l’ensemble. Quant à la crainte soudaine et visionnaire d'une guerre entre machines, elle tombe malheureusement un peu comme un cheveu sur la soupe. Reste tout de même une amusante scène de cuisine collective autour des frites (inventées par les belges, alors qu'on connaît l'inventivité des italiens en la matière...) en forme de fraternisation des peuples ennemis, qui achève de faire penser que "Comandante" est une sorte de cousin lointain de "Joyeux Noël" à la sauce italienne.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur