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CLASSMATES MINUS

Un film de Hsin-yao Huang

Les rêves d’ado doivent-ils se réaliser ?

Quand on a quarante ans, croire en l’avenir devient de plus en plus difficile. Quatre amis d’école en font la dure expérience : que faire quand les idéaux et les aspirations commencent à s’éventer et que l’on se rend compte que l’on a changé ?

Classmates Minus film movie

Sortie le 20 février 2021 sur Netflix

"Classmates Minus" pourrait être un film de Sono Sion si ce dernier s’était senti désabusé au moment de passer la quarantaine et qu’il avait perdu espoir en l’avenir, en la possibilité de changer les choses, voire de faire quelque chose pour tenter de reprendre le contrôle sur sa vie.

Les quatre personnages principaux de ce film font un dur constat : que reste-t-il de leurs rêves de jeunesse vingt ans plus tard ? La réponse à laquelle ils sont confrontés sera le cœur même du film. Cette question est également celle que se pose le réalisateur, qui se sert de son film pour expérimenter différentes voies (et voix, car c’est en quelque sorte la sienne qui va narrer les différents questionnements de chacun des personnages et également commenter leurs actions), chaque protagoniste pouvant alors apparaitre comme une face parmi d’autres d’une personnalité masculine complexe dans le Taïwan moderne.

Hsin-yao Huang filme chacun de ces quatre hommes avec douceur et émotion, cherchant à être au plus juste et au plus proche des bouleversements silencieux qu’ils vivent dans des existences qui ne leur échappent pas réellement, mais qui ne sont pas pour autant ce dont ils avaient rêvé.

Tom rêve toujours d’être réalisateur, bien qu’il ne connaisse pas grand-chose au cinéma et qu’il ne fasse que des pubs et de l’institutionnel. « Fan Man », l’assureur, sûr de lui, solitaire et déterminé, ne parvient pas à gravir les échelons et ne sait que faire de l’histoire qui le prend par surprise. « Conserve », l’éternel adolescent, ne parvient pas à trouver un emploi stable et manque de faire une bêtise en voulant changer qui il est. Et « Blocage » ne parvient plus à supporter son célibat dû à son bégaiement. Chacun fait face à un tournant, à une possibilité de nouveauté, de changement, mais rien n’est radical ni dramatique, rien n’est violent ni soudain, les choses arrivent, sans avoir été préparées, ou annoncées : comme dans la vie, elles adviennent et les personnages vont devoir faire avec.

Que faire quand le quotidien devient insupportable, ou tout simplement quand il ne ressemble plus à ce que l’on aspire, ou pire encore, quand il nous apparait pour ce qu’il est réellement, une prison que nous avons construite autour de nous tellement progressivement que nous ne nous sommes pas rendus compte que nous nous y étions enfermés ? Voilà peut-être ce qui est au cœur de ce film, mais plutôt que de traiter ce sujet avec gravité, comme un moralisateur, le réalisateur à l’intelligence de prendre ce sujet de biais et de s’intéresser à l’amour et à la relation aux femmes de chacun de ces hommes. Ils vont en effet tous se retrouver confrontés à un rêve humide d’adolescents qui devient réalisable. Que faire alors ? Sauter à pieds joints, au risque de faire vaciller le château de cartes du quotidien qui a mis des années à se construire, ou laisser le rêve passer, le regarder avec émotion et continuer sa route ?

"Classmates Minus", ce sont quatre belles histoires d’amour qui s’enchâssent dans une histoire d’amitié et de carrières professionnelles difficiles. C’est l’histoire de quatre amis, qui s’aiment profondément, malgré les erreurs et les changements. Quatre amis qui se soutiennent et qui, après des années d’inertie, voient leur monde changer. Pour le meilleur ? Pas sûr. Il n’y a sans doute pas de meilleur en soi, de toute façon, vous répondrait sans doute Hsin-yao Huang.

Des personnages forts, des dialogues et des situations qui sonnent justes, une belle photographie : le fond s’allie à la forme pour véhiculer un peu d’ironie et de surprise en développant un thème, la crise de la quarantaine, usé jusqu’à la corde. En conclusion, il s’agit d’une jolie réussite, un peu longue peut-être, mais émouvante.

Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur

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