CHAPPIE
Un beau potentiel ruiné dans sa dernière demi-heure
Décidément, cela semble visiblement être la marque "Bloomkamp" : d'excellentes mises en place de situations plus ou moins complexes dans des univers de science-fiction travaillés, finissant par s'effriter à force de facilités scénaristiques et surtout de scènes d'actions grandiloquentes et de personnages grand-guignolesques. Après donc un " District 9" complètement novateur mais concluant un peu trop à la va-vite son histoire et un "Elysium" aux canons de grosse production hollywoodienne laissant au placard toute la subtilité qui pouvait émaner du premier film du réalisateur, Bloomkamp revient en Afrique du Sud pour nous conter l'histoire de Chappie.
"Chappie" débute comme "District 9" : extraits d'interviews, reportages TV sont utilisés pour asseoir avec efficacité le contexte social, politique et technologique. L'histoire se passe à Johannesburg, capitale sud-africaine, où la violence et les bidonvilles sont légions. Le sale accent afrikaner est bel est bien audible et au bout d'une demi-heure, on se dit que Neil Bloomkamp est revenu aux basiques qui ont fait le succès de son "District 9". La scène d'intervention de police pour présenter la force de frappe des robots-flics est une brillante séquence d'action, très lisible comparée à celles d'"Elysium" et sert aussi à introduire l'élément perturbateur de l'histoire. On déchante un peu lorsque Neil Bloomkamp veut nous faire croire que les bandits qui se font exterminer par des cyborgs s'attachent autant à Chappie en l'espace de deux jours. Cependant la pilule passe vite, à force de séquences parfois amusantes, renforçant le côté "humain" du robot, et on se prend à suivre cette phase d'apprentissage avec beaucoup d'intérêt. Le récit avance bien et est porté par un montage dynamique et efficace.
Là où ça commence à se gâter sévère, c'est lorsque le personnage joué par Hugh Jackman entre en scène pour de bon, arborant son désir de vengeance à l'encontre de Deon et de sa création. L'ancien militaire, reconverti en ingénieur, devient une brute épaisse écervelée aux commandes de son Mecha. S'en suit une scène d'action finale complètement rocambolesque agrémentée d'envolées lyriques et de ralentis post-prod' totalement incongrus et de mauvais effets. Et c'est bien dommage car le propos soulevait d'intéressantes questions de fond sur les dangers de l'intelligence artificielle et la robotisation à outrance (à l'instar de "District 9" au sujet de l'apartheid et du racisme) qui sont finalement complètement noyés dans un grotesque final faisant fi de toutes contraintes scénaristiques préalablement posées. En bref, un gâchis…
Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur