Festival Que du feu 2024 encart

CHACUN SA NUIT

Magnifique et troublant

Il y avait Pierre, Nicolas, Baptiste, Sébastien… et puis Lucie. Inséparables et unis comme les 5 doigts de la main, leurs vies s’articulaient autour de la musique, de sorties, de dragues et de cours de fac. Ils menaient une vie d’insoucience jusqu’au jour ou Pierre, le frère de Lucie, est retrouvé mort dans une clairière. Sa sœur n’acceptant pas sa disparition va essayer tant bien que mal de retrouver l’auteur de ce crime. Tourmentée, à la limite de la démence, Lucie cherche à trouver qui lui a enlevé son soleil, le seul être qui compte pour elle...

Lucie et Pierre entretiennent une relation particulière, frôlant l’inceste sans jamais en la franchir la limite. Aussi touchante que troublante, cette proximité met tout de suite le spectateur mal à l’aise. Non pas par l’aspect tabou de la chose, mais parce que dans ce ‘huis clos’, seuls les 3 autres garçons de la bande sont invités à être témoins de leur attachement, et pas un de plus. Ce n’est pas la nudité non plus qu'ils exposent qui dérange, ni la liberté sexuelle qui les caractérisent. Sans complexe ni pudeur, ce ‘couple’ fusionnel fascine et dérange.

Très clairement le spectateur n’est pas invité dans cette relation, entre frère et sœur, pas même dans le groupe. A la manière de Paul, un ‘simple d’esprit’ que le groupe autorise à les espionner, le spectateur devient observateur, et même voyeur.

Barr et Arnolds choisissent des plans fixes pour filmer les actions dans la plus grande neutralité. Ces plans, parfois même tordus, peuvent donner l’impression d’un certain amateurisme de la part des réalisateurs, alors que ce choix a pour but de mettre de la distance entre l’action et de renforcer le côté contemplatif des souvenirs de Lucie, parfois désordonnés, mais toujours remplis de nostalgie et d’amour.

Tout au long du film, on oublie parfois que l’action inspirée d’un fait divers est avant tout une intrigue policière. Le meurtre de Pierre est le déclencheur de la ‘folie’ de Lucie et surtout du début de sa thérapie.

Filmé dans un cadre magnifique et sauvage où la nature et les personnages ne font qu’un, le film pose en sorte de miroir, la montagne Sainte Victoire a l’image de Lucie : pure, sauvage, passionnée, tantôt calme tantôt déchainée.

Ils sont rares ces films qui vous troublent tant que vous y pensez le soir en rentrant, puis le lendemain, et dont le simple fait d’en évoquer le titre vous donne à nouveau envie de vous y plonger.

Véronique LopesEnvoyer un message au rédacteur

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