CARNIVORES
Herbivores
Mona rêvait depuis longtemps de devenir actrice, mais c’est sa sœur Sam qui aura embrassé cette carrière à sa place, contraignant ainsi Mona à emménager chez elle et à devenir son assistante pour se sortir de ses problèmes financiers. Et tandis que Sam en vient peu à peu à négliger tout ce qui l’entoure, à commencer par son travail et sa famille, Mona comprend qu’elle a une chance de remplacer sa sœur…
Deux sœurs dont l’une veut ce que l’autre possède : même en ayant peu d’exemples de films en tête, on a un peu l’impression d’avoir vu le 7ème Art presser le citron jusqu’à la dernière goutte en matière de jeux de miroirs fratricides, et ce depuis un moment. La conception de ce premier film conçu à quatre mains a quand même le mérite d’intriguer au départ : les demi-frères Renier (Jérémie et Yannick, acteurs tous les deux) ont choisi de faire leur baptême de réalisateurs en évoquant les rapports de force et les problèmes d’ego entre deux sœurs. Un parallèle assez curieux qui laisse augurer une thérapie détournée sur grand écran, mais qui, à l’écran, se borne à des enjeux déjà rebattus dans tout ce que le tube cathodique a pu pondre comme téléfilms consensuels et clichés sur la jalousie et le sacrifice de soi. D’un milieu du cinéma nourri par la caricature et la domination (Johan Helbenbergh joue ici un simili-Pialat bien ridicule) jusqu’à un jeu de miroirs jamais exploité par le concept du « film dans le film » (l’intérêt du film semblait pourtant résider là), tout semble rester à la surface d’un sujet riche en perspectives.
Sur l’idée même de posséder l’Autre, d’utiliser le rôle de cinéma comme projection et d’en extraire un appétit vorace pour la reconnaissance (sociale et/ou familiale), "Carnivores" ne développe rien, mais veut pourtant s’en donner l’impression avec un premier degré trop affirmé pour ne pas paraître grotesque. Plus que le manque d’ambition, c’est surtout le manque de personnalité qui s’avère ici le plus problématique. Même les deux actrices, sur lesquelles le film aurait pu miser toutes ses dernières cartes au vu du talent qu’on leur connaît, tiennent ici du mauvais coup de bluff : Zita Hanrot n’est jamais crédible en star capricieuse tandis que Leïla Bekhti échoue à filtrer la moindre ambiguïté chez son personnage. Leur « affrontement » ne restera ici qu’une vue de l’esprit, y compris lors d’un final qui fait mine de prendre soudain un chemin de traverse pour au contraire repartir sur une chute faussement ambiguë. Bilan : on voulait de la viande saignante, mais on nous a juste servi des légumes tièdes.
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur