CAPTAIN FANTASTIC
De l'utopie à la réalité
Un père, vivant à l’écart de la société, avec ses six enfants, décide de se rendre à l’enterrement de leur mère, hospitalisée. Le contact avec le monde extérieur ne sera pas sans conséquence…
Le metteur en scène américain Matt Ross (acteur de séries télé, et auteur de « 28 Hotel Rooms ») nous livre une sympathique chronique sur l'inadaptation au monde et la peur de se confronter à celui-ci. Au travers du portrait d'un clan vivant à l'écart du monde, il pointe gentiment l'utopie sans la condamner, l'irresponsabilité sans la stigmatiser, et montre au travers d'un scénario de road movie tourné vers l'aventure et la comédie comment l'isolement créée l'inadaptation voire la frustration.
Car dans « Captain fantastic », point de super héros. Ce film, primé pour sa mise en scène dans la section Un certain regard du Festival de Cannes 2016, se concentre dans un premier temps sur la vie en marge de cette famille d'apparence à la fois unie, autosuffisante (le vol vient pourtant compléter la culture...), indépendante, refusant à la fois système médical, éducatif, et social. Menée par un père autoritaire tentant de faire de ses 6 enfants des adultes « extraordinaires », à la fois érudits, physiquement au top et presque indestructibles, elle constitue une sorte de mythe amené à se déliter au fil du récit.
Mais avec le départ et le contact avec les autres, c'est à un intelligent renversement des points de vue que Matt Ross nous convie. Montrant progressivement le caractère obstiné et irresponsable du père, la coupure de la réalité du monde, l'incapacité des enfants à être vraiment en adéquation avec leur âge, le scénario s'attache à exploiter les failles qui se dessinent chez chacun des personnages. De l'utopie à la réalité, les secrets enfouis dessinent en creux le portrait d'une mère absente mais aimante, et redonnent au personnage du père un aspect moins propret et idéaliste. Une œuvre touchante, où la musique a une cruciale importance, qui permet de resituer la nature humaine dans une nature rêvée comme dans le monde réel, et de relativiser les possibilités d'épanouissement de chacun.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur