LE CAPITAL
Banqueroute !
Adapté du roman éponyme de Stéphane Osmont, lui-même empruntant son titre au célèbre texte de Karl Marx, « Le Capital » marque le retour derrière la caméra de Costa-Gavras après son « Eden à l'Ouest » de 2008. Pour ce nouvel opus, le metteur en scène a décidé de s'attaquer de manière frontale au capitalisme, reprenant la trame narrative du roman, en apportant quelques modifications substantielles. Le postulat de départ est alors clair : son œuvre sera également un pamphlet contre les dérives du capitalisme, une critique d'un monde de la finance désespérément sourd face aux préoccupations des citoyens. Le spectateur est alors plongé au cœur des hautes sphères de cet étrange univers, en suivant l'ascension de Marc Tourneuil (interprété par Gad Elmaleh) à la tête d'une banque fictive. Néanmoins, de nombreuses références sont faites au monde réel, nous rappelant à chaque fois que les images montrées ne sont que le terrible reflet de notre réalité.
Malheureusement, si les intentions sont nobles, l'adaptation ne parvient jamais à concrétiser les espoirs originels, et rapidement, le long-métrage finit par ennuyer. L'un des principaux problèmes se concentre au niveau du scénario, insufflant un rythme qui donne naissance à une fiction titubante, dont le montage peu inspiré achève toute hypothétique relève. Hésitant entre drame intimiste et grande fresque sur le capitalisme, le film reste bloqué dans un « no man's land » où ni la critique du système corrompu, ni l'évolution du comportement du personnage de Marc Tourneuil ne fonctionnent. Les différents événements s’inscrivent dans une fable pessimiste, mais l’absence de demi-mesure n'offre qu'une accumulation de clichés, n'atteignant jamais la dystopie espérée. Ainsi, au fur et à mesure de son ascension, le protagoniste va se mettre à accumuler tous les défauts de la Terre, tandis que son entourage est corrompu par l'argent, à l'exception des femmes et de sa famille restée loin de Paris... S’il est certain que quelques-unes des situations décrites doivent être proches de la réalité, Costa-Gavras grossit tellement le trait qu’on en arrive aux limites du ridicule – un malfrat cupide, obsédé sexuel, arrogant, misogyne, menteur et aux tendances meurtrières, le constat est lourd ! Le drame se transforme alors en vaudeville et l’effet contestataire s’en retrouve grandement amoindri.
Toutefois, Costa-Gavras demeure un grand cinéaste et son film ne tombe jamais à un niveau catastrophique même si sa critique du système bancaire ne restera pas dans les annales cinématographiques. Le seul rescapé de cette faillite est Gad Elmaleh, qui, pour son premier rôle dramatique, nous délivre une prestation plutôt alléchante, nous démontrant qu’il est capable de jouer autre chose que le petit comique de service. Mais à l’exception de cette satisfaction, tous les indicateurs sont au rouge, à la limite du dépôt de bilan ! Il va falloir se ressaisir Monsieur-Gavras, sinon nous devrons nous contenter de vos précédents chefs-d’œuvre.
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur