BREATHLESS
Du lourd, mais du bon
« Breathless » n’est pas un film facile. Centré sur un personnage ultra-violent, qui ne sait s’exprimer qu’au travers de virulentes onomatopées et de coups de poing bien placés, il repose sur de grosses ficelles scénaristiques qui tendent à le rendre stérile. Du moins lors de la première demi-heure. En effet, passée la trivialité de l’histoire et des dialogues, la profondeur des personnages prend le dessus. Celui de Yeon-Hee, petit bout de femme pas comme les autres, évolue avec notamment beaucoup de finesse, dotant le film d’un charme insoupçonné. Il est vrai que « Breathless » doit beaucoup au talent de la jeune actrice, qui crève littéralement l’écran en apportant l’intelligence, l’humour et la finesse qui manquent à l’ensemble des personnages.
Le film gagne alors en intérêt, révélant sa richesse à travers une mise en scène de plus en plus efficace. Les mouvements de caméra à l’épaule se précisent. La violence, bien qu’écrasante, devient un langage à part entière (à la manière des premiers films de Takeshi Kitano). L’anarchie ambiante trouve même son rythme, grâce à un habile montage entrecoupant scènes de confrontation nerveuses et plans descriptifs plus larges, qui servent admirablement la progression des personnages. Même le personnage principal, véritable boule de nerfs mono-expressive, s’épaissit au point de devenir émouvant. Cette scène majeure, dans laquelle il s’abandonne enfin dans les bras de sa jeune amie, constitue en cela l’un des plus beaux moments du film.
Outrancier et viscéral, « Breathless » est un film qui assume pleinement ses excès. Il secoue, bouleverse, cumule les injustices, mais affiche au final un optimisme qu’on n’attendait pas au tournant. Un premier film remarquable et remarqué, grand vainqueur au festival du film asiatique de Deauville en 2009.
Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur