BLACK PANTHER
Black Power
Après la mort de son père, T’Challa alias Black Panther doit prendre sa succession à la tête du Wakanda. Cependant, tout ne sera pas de tout repos pour le nouveau roi qui devra faire faire à une vengeance familiale…
Premier super-héros noir porté à l’écran par Marvel Studios (Luke Cage étant lui sur le petit écran), Black Panther était attendu au tournant après une apparition en second couteau dans "Captain America : Civil War". Que vaut l’aventure solo du super-héros du Wakanda ? En une phrase, disons que "Black Panther" n’est pas le meilleur Marvel mais pas non plus le plus mauvais. Force est de constater qu’il remplit dans l’ensemble le cahier des charges du film de super-héros Marvel. Cependant, on s’écarte du sentier classique puisque le héros connait ses pouvoirs (qui proviennent d’une fleur), porte le costume dès le début, c’est donc un autre parcours qui nous est proposé : celui de réussir à diriger un pays et d’en devenir un digne roi.
Le scénario possède un sous-texte politico-social intéressant (la communauté noire) mais exploité de façon simpliste et ne peut ainsi se poser totalement en miroir de la situation de cette communauté aux Etats-Unis (à ce titre, "Get Out" frappe plus fort et plus juste). On se retrouve donc dans une lutte communautaire avec d’un côté une vision pacifiste et de l’autre une ambition plus violente. Ce qui nous amène à un duel qui ne pourra être que brutal par le jusqu’au boutisme de l’un des deux protagonistes (on n’hésite plus ici à faire le ménage dans les personnages). T’Chala finit par se muer en une sorte de Martin Luther King dans un discours rassembleur, prônant l’ouverture à l’autre en temps de crise (« bâtir des ponts et non des barrières entre les hommes ») face aux Nations Unies. Mais le véritable fil rouge du scénario est la vengeance : c’est elle qui pousse les personnages à agir, et dompte leurs actions.
Les toutes premières minutes en animation 3D pour nous expliquer l’histoire du Wakanda sont une bonne trouvaille tout comme la bande son marquée par la culture noire américaine tout en proposant des sonorités africaines. L’ensemble du long-métrage est aussi saupoudré de chamanisme et de mysticisme issus de la culture africaine. L’humour est moins présent que dans d’autres Marvel mais fonctionne bien. Visuellement, deux-trois séquences sont intéressantes (la course poursuite en Corée du Sud notamment), et certains plans nous font penser au "Roi Lion" de Disney (est-ce une simple coïncidence?). Cependant, lorsque se déroule la scène du combat final entre les tribus (d’ailleurs d’où viennent ces rhinocéros qui sortent de terre ? Ils ont pris un tunnel depuis leur enclos à la frontière ?), on ne peut qu’être déçu de la pauvreté visuelle de l’environnement où ils combattent. À l’image de la ville centrale du Wakanda, mégalopole bourrée de technologie mais totalement sous exploitée par le scénario (on reste soit dans un labo souterrain, soit dans un palais).
"Black Panther" est porté par un casting quasi intégralement noir (à l’exception de Martin Freeman et d’Andy Serkis) et quel casting : Chadwick Boseman, Michael B. Jordan, Forest Whitaker… Mais ces derniers se feraient presque voler la vedette par le trio féminin Lupita Nyong’o, Danai Gurira, Letitia Wright. Elles ne sont plus seulement de simples faire-valoir : elles portent les armes, se battent et sont un appui nécessaire au héros à l’image de la sœur de T’Challa, sorte de Tony Stark au féminin qui conçoit le costume et les armes de Black Panther. Marvel Studios commence donc doucement l’année avec un "Black Panther" un brin simpliste et n’offrant pas la puissance visuelle qu’aurait pu nous apporter ce voyage en Afrique, au cœur du Wakanda. Ryan Coogler y déploie un formidable casting mais accouche d’un film de la taille d’Ant-man, comme si ses ambitions s’étaient prises dans les toiles de Spider-man. Cependant "Black Panther" a le mérite de creuser un sillon plus politique et social avec un super-héros noir. Espérons qu’il ne reste pas seul, même si au vu de son succès actuel cette "Black Panther" risque de revenir en solo.
Kevin GueydanEnvoyer un message au rédacteur