BEYOND
Une leçon de vie
Il est un plaisir réjouissant que de retrouver Noomi Rapace dans un tout autre contexte que celui de « Millenium », saga aux 3 volets, qui tient sa réussite notamment à travers de son personnage de Lisbeth Salander. «Beyond» est une pour elle une nouvelle page et une page bien écrite.
La force de ce film est la richesse d’émotions, très intenses, qui nous parcourent tout au long de la séance. C’est ainsi que ce long métrage débute par la mise en scène d’un bonheur familial qui réchauffe le cœur et fait plaisir à partager. Mais très vite, nous redevenons étrangement attentifs, car le ton change du tout au tout en quelques minutes avec ce coup de fil en quelque sorte maudit, annonciateur de l’apocalypse. Leena se voit dans l’obligation de ressasser le passé et sa vie de famille déchirée par la violence d’un père alcoolique, une mère impuissante et impulsive, et un petit frère fragile, complètement déboussolé par son entourage et divers évènements.
Dès lors, le film alterne avec fluidité les scènes présentes et les flashbacks. Sans jamais tomber dans l’excessif ou l’immoralité le plus totale, «Beyond» nous dévoile avec force la dureté et la tristesse d’une famille qui se décompose petit à petit. Les scènes du passé sont emplies de tension, chaque acte du père ou de la mère pouvant amener une brique supplémentaire au mur de la honte, faisant s’accrocher le spectateur à son siège qui prie pour que rien ne se passe. La présence de la petite Leena (Tehilla Blad) rassure, grande sœur protectrice vis à vis de son frère, et toujours arrangeante. Les scènes du présent reflètent la torture et toute la rancœur de Leena : jeune, elle avait dû subir cette triste histoire sans jamais craquer, car la volonté de préserver tant que possible le bien être de son frère était la plus forte. Mais ce qui est trop longtemps contenu et surchargé, doit un jour ou l’autre déborder...
Le passé rattrape le présent et l’explosion et la douleur ne font plus qu’un, nous laissant non plus uniquement spectateur mais acteur, d’une impuissance et d’une culpabilité illogique. Que de larmes... Pernilla August a dirigé d’une main de fer dans un gant de velours ce long-métrage délicat mais intense, où Noomi Rapace endosse à nouveau le personnage d'une jeune femme torturée, rôle idéal pour elle. Notons que Tehilla Bald (Leena en jeune fille), qui jouait déjà le rôle de Noomi Rapace en plus jeune dans la trilogie des « Millenium », maitrise le sujet.
Ici on ne se prend pas à rêver, mais à déguster les dessous meurtriers de certaines familles. La musique s’accorde à merveille et les plans-caméra très intimistes rendent l’œuvre immersive. Pernilla August ne met pas vraiment de coupable en avant, mais révèle une triste réalité : nous sommes tous victime de quelque chose et notre plus grande faiblesse est d’en faire payer les conséquences à ceux qui nous entourent...
Jean-Philippe MartinEnvoyer un message au rédacteur