BERLIN BOYS

Un film de David Wnendt

Coincés dans l’engrenage entre bandes rivales

Sous le soleil écrasant du début d’été berlinois, Lukas, élevé de 3ème se trouve refusé à l’entrée du collège, car il a oublié sa pièce d’identité. Séchant les cours, il croise d’abord son ami Gino, vont ensuite ensemble chercher Julian, qui ne pense qu’à une chose : draguer. Mais en traversant la cité, ils se retrouvent à proximité d’un groupe de dealers arabes qui rapidement en viennent à les tabasser, Lukas terminant avec le visage en sang. Mais la bande turque voisine prend fait et cause pour eux et déclenche un affrontement avec les Arabes, obligeant Lukas à frapper le premier…

Passé par la section hors compétition du Festival de Berlin 2023, "Berlin Boys" sort en France en SVOD en exclusivité sur UniversCiné en un mois de juillet qui sied parfaitement à l’ambiance estivale du film. Pour ce récit d’un engrenage implacable, coinçant trois adolescents entre des bandes rivales et une logique de vengeance en apparence sans fin ni limites, le réalisateur nous plonge dans un microcosme dominé par les hommes, en utilisant des effets de « négatif » photo colorés des plus efficaces. À l’issue de l’altercation entre bandes, Lukas, amoché, se retrouve en effet la cible de la bande arabe, qui lui réclame le remboursement de 500 euros qu’aurait dérobés la bande qui a pris sa défense, ceci dans un délai impossible : d’ici le lendemain 15h. C’est cette deadline qui va marquer l’urgence du récit, avec laquelle la mise en scène de David Wnendt ("Il est de retour") se met au diapason, embrassant les lieux par des plans par drones, usant d’accélérés pour les moments festifs de répit apparent (une soirée de beuverie, un moment en boîte…) et projetant le spectateur au cœur de scènes tendues de baston ou de vol.

L’enjeu basculant sur la nécessité de trouver de l’argent afin d’éviter le pire à Lukas, ce sont en arrière plan diverses problématiques qui sont évoquées (climat insurrectionnel en classe, irrespect des représentants des institutions, violence conjugale, désir de fuite vers d’autres lieux, nécessité de la riposte pour se faire respecter, petite délinquance, trafics en tous genres, considération de la femme comme un objet ou une cible…) au sein d’une micro-société qui semble avoir ses propres règles, ou qui s’assure de leur absence. On saluera ici la justesse de l’ensemble du jeune casting, au sein d’un film qui exploite de manière graphiquement efficace le décor de la cité, entre ses places de béton (un plan zénithal marquant qui renvoie au titre original du film : "Soleil et Béton"), ses espaces verts squattés, ses immeubles impersonnels. Un efficace récit d’une amitié et d’une adolescence mise à mal par des pressions externes, sans vergogne aucune, dont le symbole le plus marquant est sans doute cette carte d’identité du collégien, qui découpée, sert à un malfrat à se rouler des clopes.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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