BENDS
À la frontière de deux mondes
Anna menait la belle vie, celle d’une épouse hongkongaise fortunée, où ses seuls soucis se limitaient à ne pas rater son cours de danse ou la dernière exposition à la mode. Mais lorsque son mari la quitte brutalement, c’est à lutter pour sauver les apparences qu’elle va désormais œuvrer. Sans le savoir, son chauffeur se bat lui aussi chaque jour, pour que son enfant naisse à Hong-Kong afin de contourner la « Loi de l’enfant unique ». Deux destins si différents et pourtant si liés…
Au travers de l’histoire de Fai, "Bends" aborde la complexité absurde que connaissent les couples qui veulent avoir un deuxième enfant dans la zone tampon de Shenzen, coincée entre Hong Kong et le reste de la Chine. Si la mère accouche dans ce territoire la famille devra payer une taxe comme l’impose le gouvernement chinois avec sa politique nataliste restrictive. Par contre si elle réussit à accoucher à Hong Kong, elle profitera du statut privilégié de la péninsule anciennement britannique et ne devra s’acquitter d’aucun impôt.
Pour étoffer son propos la réalisatrice met en parallèle la problématique du couple avec la déchéance de la patronne de Fai, une femme richissime, qui du jour au lendemain se retrouve abandonnée par son mari lui laissant ses dettes et aucun moyen de survie. Les deux destins vont se croiser dans l’habitacle d’une voiture sans qu’aucun des protagonistes ne laisse paraître ses inquiétudes. Telle la théorie Feng Shui, dont Anna est une fervente adepte, le salut de la famille de Fai dépend de l’endroit ou elle se trouve, alors que la femme aisée doit vendre les objets sensés apporter la sérénité de son habitat.
L’antinomie de ces deux personnages, maintes fois traitée sur grand écran, se développe de façon appliquée mais malheureusement sans grand relief. Les personnages contraints de cacher leur désarroi sont assez lisses et n’aspirent que peu d’empathie. Le père est modèle et la femme richissime reste digne malgré sa chute vertigineuse dans l’échelle sociale. Le récit se déroule ainsi purement narratif, passant de l’un à l’autre, sans la moindre aspérité qui puisse apporter au film une réelle originalité. Un film classique qui offre néanmoins un saisissant instantanée de la situation géopolitique hongkongaise, qui depuis sa rétrocession à la Chine en 1997, entretient avec cette dernière, une relation de plus en plus problématique.
Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur