BÉCASSINE !
Une mélancolie poétique mais pesante
Depuis qu’il a adapté les aventures de Rouletabille (avec "Le Mystère de la chambre jaune" puis "Le Parfum de la dame en noir"), on connaît le goût de Bruno Podalydès pour les personnages du début du XXe siècle et les ambiances à la fois rétro et loufoques. En s’attaquant à Bécassine, il prenait le même risque que les nombreux scénaristes et réalisateurs qui se sont attaqué (souvent en se cassant les dents) à des personnages trop « bédéesques » pour devenir crédibles dans une adaptation en chair et en os. Évitant la tentation de la transposition dans une époque plus contemporaine et axant son film sur la malice et l’onirisme, il réussit à surmonter cet obstacle majeur, car le spectateur ne se pose guère la question de la vraisemblance.
Hélas, le scénario piétine et les personnages sont comme prisonniers d’une roue de hamster. La monotonie s’installe et la mélancolie prend le pas sur l’humour, installant un rythme plombant (voire aussi déprimant que "Ma Loute" de Bruno Dumont) et annihilant tous les efforts d’interprétation ou de mise en scène. Les personnages secondaires ne trouvent pas toujours leur place (Vimala Pons est clairement sous-utilisée) et certains gags tombent complètement à plat. Les plus jeunes risquent clairement de s’ennuyer malgré la jolie poésie de certains instants, quand les adultes se consoleront avec quelques répliques de Karin Viard ou avec le personnage de Rastaquoueros incarné par le réalisateur lui-même, qui propose une délicieuse mise en abyme sur l’illusion cinématographique. Avec tous les ingrédients à sa disposition, Podalydès a malheureusement raté la recette et la digestion n’est pas garantie…
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur