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BARBÈS, LITTLE ALGÉRIE

Un film de Hassan Guerrar

Chronique humaniste d’un quartier paradoxal

Malek emménage dans le quartier de Barbès en plein milieu du COVID. Rapidement, il devient ami avec plusieurs membres de la communauté algérienne, très présente dans ce quartier parisien. Une manière pour lui de renouer avec ses origines…

Si beaucoup d’acteurs passent derrière la caméra, il est plus rare de voir un attaché de presse franchir le pas. C’est pourtant ce qu’a fait Hassan Guerrar, signant donc ici sa première réalisation, une œuvre sensible et pudique qui nous plonge au cœur du quartier de Barbès. À l’image du récent "Goutte d’Or" de Clément Cogitore qui nous invitait dans le babélique 18ème arrondissement de Paris, le film est avant tout le portrait d’une communauté, dont le spectateur fera la découverte par le regard du personnage principal, Malek. Quadragénaire célibataire, celui-ci atterrit dans cette zone de la capitale, en plein COVID, déambulant dans les rues à la rencontre de ses figures, de ceux qui la font vivre et l’animent.

Les débuts du métrage sont ainsi un hommage appuyé et affectueux envers ce district dont la mauvaise réputation semble totalement déconnectée d’une réalité où l’entraide guide les voisins. Tout le monde prend soin de son prochain, fait du bénévolat, accompagne les plus démunis. On serait presque face à un village isolé où la bonté guide les âmes et le chaland, au point de trouver l’ensemble trop naïf, trop mièvre. L’arrivée du neveu du protagoniste, venu poursuivre ses études en France, confirmerait presque cette impression de narration aux intentions louables mais trop mielleuses. Mais tout est dans le « presque », dans cette nuance qui va d’un coup transformer la gentille comédie sur la quête d’origine en un drame nettement plus sombre.

Car dans ce monde où la fraternité est un maître-mot, la violence peut aussi surgir, aussi subite qu’inattendue. Ici, la violence n’a pas besoin d’être préméditée, ni même motivée. Un simple regard, une mauvaise blague, et c’est tout un équilibre qui bascule, des vies qui sont bouleversées. Multipliant pourtant les sous-intrigues, Hassan Guerrar ne perd jamais le fil de son récit, porté par un Sofiane Zermani qui s’affirme définitivement comme un acteur à suivre. Récemment vu dans "Avant que les flammes ne s’éteignent" et "La Vénus d’argent" sur grand écran, ainsi que dans "Le Salaire de la peur" sur Netflix, le rappeur démontre qu’il n’a pas besoin de multiplier les effets pour envoyer des scènes coups de poing.

Puissant et bouleversant, "Barbès, Little Algérie" fait partie de ces œuvres qui combattent les clichés sans pour autant cacher sous le tapis les drames du quotidien. Si quelques maladresses empêchent le film de prendre totalement son envol, le résultat demeure une belle surprise, où la bienveillance n’est pas un gros mot, et où la solidarité n’empêche pas la fatalité de frapper. Un constat banal pour un film qui l’est nettement moins. À découvrir dans les salles obscures !

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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