BAARIA
Redonner goût à l'engagement politique
L'ouverture du festival de Venise 2009 revenait pour une fois à un film italien, une grande fresque sur plusieurs générations, signée Giuseppe Tornatore, auteur du multi-primé "Cinema Paradiso" (mais aussi de "Milena", "La légende du pianiste sur l'océan"). Une chose est sûre, son "Baaria" ne manque pas de souffle, et il suffit de quelques plans pour que le metteur en scène nous entraîne dans une Sicile des années 30, pauvre et affamée. Du père, dit "Cicco", on retiendra la sagesse. De ses enfants, dont le volontaire "Peppino", on retiendra la passion, l'envie de changement.
Car c'est l'orgueil des petits que donne à voir "Baaria", au travers de trois destins d'une même famille, intimement liés à l'histoire politique d'un pays. Des moqueries du Dulce, aux coffres fracassés de la libération, jusqu'à la tentative de réforme agraire face aux puissants Corleone, Tornatore use avec parcimonie des symboles de partage des richesses que pouvait laisser espérer une vague communiste, dans un pays aujourd'hui embourbé dans l'affairisme et les connivences politiques.
Il nous montre ainsi comment un petit village sera bientôt englobé comme faubourgs de Palerme, grandissant progressivement, au fil de l'implication politique de ses habitants, tout en étant au final lui aussi avalé par un système, mafieux comme politique. La parabole fait peur, mais elle est efficace et rudement d'actualité. Si Berlusconi a voulu voir dans le film un constat de l'échec du communisme, il est aussi une implacable critique des politiques en place, tout comme un plaidoyer pour l'engagement politique citoyen.
Contant avec une certaine poésie les ambitions et les désillusions d'un enfant qui deviendra communiste, "Baaria" dégage à la fois un charme ensoleillé et un souffle humaniste, décrivant ainsi une famille italienne n'arrivant pas, à l'image d'un pays aujourd'hui en manque d'ambition et d'idéal, à embrasser le monde comme elle le souhaiterait. L'ampleur de la mise en scène et de la figuration, l'usage répété du travelling ou de vues aériennes, achèvent de faire de ce film, une fresque contemporaine, au charme ancien désuet, mais au souffle communicatif.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur