AVANT LA FIN DE L'ÉTÉ
Un tendre regard sur l'exil et le rapport à un pays autre
Après plusieurs années d’études en France, Arash ne s’est toujours pas fait à la vie locale. Alors qu’il a décidé de rentrer en Iran, deux de ses amis iraniens, Hossein et Ashkan, décident de l’emmener sur les routes, en camping, vivre quelques derniers moments d’amitié et de découverte…
Ce fut l'une des petites surprises dont le Festival de Cannes a le secret. Une fiction aux élans de documentaire centrée sur trois jeunes Iraniens vivant en France, et partant sur les routes camper, alors que l'un d'entre eux doit rentrer en Iran à la fin de l'été. Avec une tendresse évidente, la réalisatrice suit ces trois jeunes hommes, exposant au hasard d'une discussion leur amour pour la France, leurs espoirs d'avenir, et leur ressenti concernant leur pays, entre manque évident et d'une perte de liberté, expérimentée au prix d'un exil.
Maryam Goormaghtigh a fait d'un projet initial basé sur des rendez-vous récurrents avec ces trois jeunes hommes, rencontrés dans un café aux abords de l'Institut des Langues Orientales où elle prenait des cours de persan, une véritable fiction, imprégnée d'idées communes et de réflexions entendues. N'ayant écrit aucun dialogue, elle a imaginé un certain nombre de situations, provoqué des rencontres, pour mieux révéler l'état d'esprit de chacun, et les contradictions qui les rongent. De la difficulté potentielle à se faire de réels amis, aux problèmes liés à la langue, la confrontation avec une France profonde, ouverte et attachante dans ses traditions légèrement ringardes, met en évidence la richesse des différentes cultures.
L'humour omniprésent aide à contrebalancer les souvenirs concernant le contrôle social sur l'individu, qu'il soit lié aux préceptes religieux ou moraux, et les moments où la réalité de leur pays les rattrape (un coup de fil d'une sœur, une allusion au service militaire obligatoire...). Le sujet des plaisirs, qu'il s'agisse des filles ou de l'alcool, revient régulièrement. L'un des garçons avoue par exemple qu'il regrettera par dessus tout "le rayon alcool de chez Carrefour" et que sa consommation de boissons fera que "l'enfer (il) y va en TGV". Grâce aux différences culturelles, de jolies scènes de dragues se transforment aisément en scènes de comédie, et des dialogues bien sentis (ah, le discours sur les 3 types de pets en persan) font entrer un spectateur complice dans ce plaisant cercle d'amis. Loquace et juste, "Avant la fin de l'été" mérite donc indéniablement le détour.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur