Festival Que du feu 2024 encart

ANAÏS, 2 CHAPITRES

Un film de Marion Gervais

Une forte tête pour deux défis magnifiques

En 2012, malgré les nombreux obstacles, une jeune agricultrice tente de démarrer une production de plantes aromatiques et de tisanes en Bretagne. Puis, dix ans plus tard, elle fait face à un nouveau défi : faire venir en France le jeune Sénégalais avec lequel elle s’est mariée…

Anaïs 2 chapitres film documentaire documentary movie

Ce documentaire est à l’image de son héroïne : tantôt frontal, tantôt doux. Si le style peut sembler simple en apparence, le film s’écarte du classicisme par des plans qui peuvent s’avérer très travaillés voire poétiques, ou par certaines audaces de montage (par exemple en jouant sur les contrastes lors de l’épisode parisien, avec de très intelligentes insertions). Anaïs, l’agricultrice au centre du métrage, a les mêmes caractéristiques : un mélange de grâce et de férocité, de délicatesse et de franc-parler, d’enthousiasme et de lucidité. Tout ça pour un bel équilibre, tant pour la femme que pour le film.

Construit en deux parties, "Anaïs, 2 chapitres" est en fait un montage réunissant deux documentaires tournés par Marion Gervais à dix ans d’intervalle (et on pense forcément à "La Ferme des Bertrand" de Gilles Perret qui a lui aussi filmé les mêmes agriculteurs durant deux périodes) : "Anaïs s’en va-t-en guerre"* et "Anaïs s’en va aimer", respectivement filmés en 2012 et 2022, et qui ont connu une exploitation distincte (mais pas une sortie nationale en salles) avant d’être réunis ici. La mise bout à bout de ces deux documentaires permet de montrer à la fois l’évolution et la continuité dans la vie et la mentalité de l’agricultrice.

Il est révélateur que chaque chapitre s’ouvre sur une même colère contre l’administration : Anaïs est une acharnée et une révoltée, qui ne baissera pas les bras devant les injustices ou l’absurdité du monde. Pleine et entière, elle connaît la discrimination, au travers des procès en incompétence qui ne manquent pas envers une femme – qui plus est jolie et plutôt fluette – dans un monde agricole traditionnellement machiste. Son vécu fait ainsi écho aux obstacles que connaît son mari sénégalais. Les défis et obstacles s’imbriquent et se complètent, dans un documentaire beau et humaniste, qui apporte un regard différent sur l’agriculture, l’immigration et bien d’autres thématiques annexes.

* NB : Anaïs Kerhoas a repris le titre "Anaïs s’en va-t-en guerre" pour un livre qu’elle a écrit pour parler de son parcours. Il a été édité en 2020 aux éditions des Équateurs.

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

BANDE ANNONCE

Laisser un commentaire