Festival Que du feu 2024 encart

ADAMA

Un film de Simon Rouby

Alliance de différentes techniques d’animation pour un sujet fort

Adama, 12 ans, vit dans un petit village d'Afrique de l'Ouest. Alors que la cérémonie d'initiation s'est mal passée pour son grand frère, Samba, du fait d'un mauvais présage, assiste impuissant au départ de celui-ci, pour rejoindre les Nassaras, un peuple jugé dangereux. Avec l'aide de l'or que son frère lui a laissé, il va entreprendre un grand voyage, à sa recherche...

"Adama" est un film d'animation qui vous surprend à presque chaque instant. D'abord par son aspect formel : les premières minutes déstabilisent le spectateur habitué à des images de synthèse léchées et fluides. Ensuite par la puissance de son scénario en forme de road-movie tournant à la quête initiatique, et convoquant les thèmes de la guerre, du colonialisme et surtout de l'immigration. Ce qui en fait un film en pleine prise avec l'actualité.

Simon Rouby, dont c'est le premier long métrage, signe une œuvre à part dans le paysage de l'animation française. En effet, son film allie scans de bustes de statues en argile et images de synthèse pour offrir aux personnages principaux un aspect rugueux et des mouvements légèrement saccadés, des aspects très vite oubliés tant l'histoire est captivante. Les personnages de seconds plans restent eux en deux dimensions, sur des fonds de décors peints.

Chaque étape du voyage semble avoir une couleur bien spécifique, de l'oasis africain aux no man's land de Verdun, du désert (avec de superbes vues de mirages et de nuages de sable) à la ville et son marché grouillant ou son port, de la France industrielle à Paris. Et le plus beau dans tout cela : un ensemble de plans vus au travers de lunettes de masque à gaz, représentant des symboles du conflit (canons, tirs, défilés...), avec l'aide de sable noir magnétisé.

Tourné au studio Pipangai, autrefois en sommeil, sur l’Île de la Réunion, le film a le mérite d'aborder, chose rare, l'implication de la « Force noire » au cours de la première guerre mondiale. Touchant, il suit, à hauteur d'enfant, les agissements d'adultes embringués dans une cause beaucoup plus grande qu'eux, chacun vivant son implication de différente manière. Il rend enfin un vibrant hommage aux tirailleurs sénégalais, en s'inspirant notamment de la vie du dernier de ces combattants, Abdoulaye N’Diaye, décédé en 1998.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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