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ABOUT KIM SOHEE

Un film de July Jung

Presque deux films en un pour un brûlot dénonciateur

Pour son stage de fin de lycée, la jeune Kim Sohee intègre un centre d’appel de Korea Telecom. Elle décroche un contrat à 1600 dollars par mois, apprend un « art de la persuasion » qui lui pèse, et subit, comme son manager, de fortes pressions. Alors qu’elle est jugée comme manquant de volonté et que celui-ci est retrouvé mort dans sa voiture, sa nouvelle cheffe demande encore plus de rendement. Quelques temps plus tard, les autorités vont s’intéresser aux méthodes de management de l’entreprise…

About Kim Sohee film movie

Découvert en clôture de la Semaine de la critique cannoise 2022, le film coréen "About Kim Sohee" génère une sorte d'électrochoc sur la thématique de l’exploitation des stagiaires et de la maltraitance au travail. Alors intitulé "Next Sohee", comme pour mieux souligner la répétitivité du type de fait divers relaté ici, Sohee étant le prénom de cette jeune femme volontaire amenée à faire un stage dans le Call center d’une grande compagnie d’abonnement internet et téléphonique, et qui se retrouve en situation de détresse face à des conditions de travail éreintantes, au sein d’un système méprisant finalement autant le client que l'employé.

Découvrant les rouages et les objectifs irraisonnés qui lui sont assignés, elle n’a aucun mal au départ à adopter ce qui est hypocritement appelé « l’art de la persuasion », quand il s’agit notamment de faire renoncer les clients à des résiliations. Les résultats n'étant cependant pas au rendez-vous, autant son école que son manager lui mettent alors la pression. Mais peu de temps après, son manager est retrouvé mort dans sa voiture, et une enquêtrice commence à s’intéresser aux méthodes de l’entreprise. Travaillant dans la première partie du film sur le ressenti de la jeune femme, July Jung (découverte à Un certain regard avec "A Girl at my door") décrit l’évolution de l’état psychologique de son personnage par ses sauts d’humeur, comme par un travail sur le son, allant jusqu’à inclure des flots de paroles répétitives et des bruits de clavier dans l’une des scènes clés du métrage.

Sans dévoiler l’essentiel de l’intrigue, on peut dire que le film dispose d’un point de bascule autour d’une accalmie, où le sensoriel semble prendre le dessus sur la sensation d’étouffement (une lumière qui effleure un pied, une douce neige qui tombe...), en son milieu, faisant alors plonger l’intrigue dans le film d’enquête. À la fois dénonciateur d’un système éducatif qui ne sait qu’agir par la culpabilisation et le « shaming », et d’un milieu du travail qui ne sert que ses propres intérêts, allant jusqu’à harceler ses employés, le scénario décortique la chaîne de responsabilités dans un système qui écrase les individus. Fort justement, la réalisatrice prend son temps, dévoilant un intense mais ouaté brûlot, porté par deux actrices formidables, Kim Si-eun ("Mademoiselle") dans le rôle de Kim Sohee et la toujours fascinante Doona Bae ("A girl at my door", "Tunnel", "Les Bonnes étoiles") dans celui de l’enquêtrice.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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