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THE 727 DAYS WITHOUT KARAMO

Un film de Anja Salomonowitz

Un captivant plaidoyer contre la rigidité d'un système qui ignore l'humain

Plusieurs couples, confrontés à divers obstacles pour faire reconnaître leur union par l'État autrichien, content leur désarroi. Certains voient avec terreur arriver la fin de leur visa, d'autres comptent les jours jusqu'au retour tant attendu du conjoint déporté...

Film autrichien que l'on peut légitimement considéré comme un documentaire, "The 727 Days Without Karamo" empreinte pourtant des voies bien singulières pour parler d'immigration et du chemin de croix que doivent arpenter des couples mixtes, pour pouvoir un jour vivre ensemble. Il faut dire que le pays en question dispose d'une législation extrêmement contraignante, et de systèmes de contrôle puissants, dont les objectifs semblent résolument ignorer l'humain aux faveurs de raisonnements purement administratifs.

Usant de différents médias, le film mélange témoignages émouvants, apartés face caméra, dialogues de tous les jours internes à un même couple, qu'il soit hétéro ou gay, lectures de lettres à voix haute, commentaires personnels en voix-off… Il en résulte une œuvre percutante, qui dénonce à la fois des règles administratives pénalisantes (multiplicité des formulaires, délais de traitement ahurissants, déportation doublée de situations humiliantes...), un système dysfonctionnant (les changements perpétuels de lieux pour l'obligation d'apprentissage de la langue, les visite de contrôle clairement abusives...), et des comportements individuels où le racisme quotidien pointe clairement son nez (l'épouvantable lettre d'un père qui n'assistera pas au mariage de sa fille...).

Décrivant l'ampleur de la tâche qui attend ceux qui prétendent vivre ensemble, malgré les obstacles, la multitude de petites histoires qui se combinent ici fait rager et exprime avec conviction l'indignation de tous ceux qui apparaissent à l'écran. Film clairement politique et revendicatif, "The 727 Days Without Karamo" décrit l'intolérable, tout en adoptant un parti-pris esthétique, grâce à un sens du cadre indéniable, et à une unité visuelle due à l'utilisation de la couleur jaune dans quasiment tous les plans, au travers des vêtements des protagonistes, des décors, ou de certains objets parsemés dans le cadre.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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