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VENISE 2009 – Deux espoirs d'immigrants
La Mostra de Venise est réputée pour à la fois accueillir plus de grosses machines hollywoodiennes que notre Festival de Cannes, mais également pour faire une part plus grande aux découvertes au sein de sa compétition, Cannes y faisant figurer habituellement son cortège d'habitués. Dans les sections parallèle, ce sont plus de petits films, d'auteurs souvent inconnus ou revenant aux sources, qui créent l'évènement. On pouvait y trouver cette année deux films abordant le thème de l'immigration et des espoirs attenants, de manière tout à fait différente.
« Francesca », film roumain ayant ouvert en 2009 la section "Orrizonti" (« Horizons ») se concentrait sur le désir de son héroine, une pimpante jeune femme, fille de militaire, tentant de convaincre son petit ami de partir avec elle en Italie. Derrière ce futur voyage en gestation, on découvrait alors une comédie sociale, sur fond d'impossibilité de se sortir d'une situation locale durablement dégradée, où mafia et économie souterraines dirigent la vie de ceux qui y mettent les doigts. Mais le plus intéressant ne résidait pas dans cette peinture, plutôt sommaire, de la situation d'un pays.
C'est dans l'espoir généré par l'idée du voyage que résidait l'intérêt du propos. Le personnage interprété par Monica Barladeanu (au charme et au naturel aérien) portait non seulement l'espoir-cliché d'une vie meilleure en Italie, conscient d'un voyage potentiellement teinté de dangers, mais soucieux d'aller améliorer l'image des roumains dans ce pays. Car si les roumains détestent quelque chose, c'est bien d'être assimilés aux Roms, dont l'image est déplorable dans les pays de l'Est, prequ'autant qu'on eur parle de Dracula, au destin dévoyé par un certain Bram Stoker. Égrenant un à un, et avec recul, les clichés réciproques sur les roumains voleurs et les italiens racistes, le réalisateur a ainsi concocté une première partie plutôt juste, sincère et légère, qui sans être angélique, imprimera le reste du film d'un optimisme de rigueur vis à vis du fait d'immigrer.
L'espoir était aussi le moteur principal des personnages de « Harragas » (les « brûleurs »), dans lequel Merzak Allouache (« Bab el web », « Chouchou ») décrit avec minutie et force détails, le parcours du combattant de deux amis pour traverser en bateau la méditerranée, depuis un port d'Algérie (Mostaganem) jusqu'aux cotes d'Espagne. Accompagnés de la petite amie d'un d'eux et d'autres « clients » de vils passeurs, ses personnages représentent les aspirations de toutes les classes sociales, des plus éduqués (étudiants comme flics ou religieux...) aux plus pauvres (paysans et peuplades du Sahara), de tous les sexes (la copine de l'un des deux s'incruste), à vouloir partir d'un "pays devenu prison".
Faisant du manque de considération la principale cause du manque de liberté, le réalisateur ne pointe pas directement de responsable du destin de ces migrants clandestins, souvent fatal, désignant à la fois les intégristes musulmans et les autorités des pays qui ceinturent la Méditerranée. Il s'interroge surtout avec justesse sur les divisions d'un peuple, devenu incapable d'apprécier sa propre richesse. Car le fait de partir, souvent motivé par une nécessité économique, n'a rien d'anodin, et constitue également un renoncement à améliorer la situation locale, à faire changer politiquement les choses, à résister.