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Clermont-Ferrand 2024

Festival de Clermont-Ferrand 2024 - retour sur le Programme F5

J’AI VU LE VISAGE DU DIABLE de Julia Kowalski

4 étoiles

Majka, une jeune fille de 18 ans, qui vit dans un petit village de Pologne, croit être possédée et demande de l’aide à un prêtre exorciste.

Il est ici question de la détresse d’une jeune fille qui n’accepte pas son désir pour les femmes. Cette détresse est accentuée par son isolement social, avec un père lui-même dépassé, et par ce village perdu en forêt qui se laisse guider par le prêtre d’un autre temps. Majka décide de se guérir avec une thérapie de conversion. Dans cette région reculée on appelle même ça un exorcisme. Finalement ce film inverse la triste réalité de ces thérapies de conversion, [ATTENTION Spoiler] car c’est lors de son exorcisme et sa crise hystérique que Majka ose lâcher prise et qu’elle commence à s’assumer comme elle est. Au retour de sa séance d’exorcisme, un flirt avec sa voisine de bus laisse entendre qu’elle s’accepte enfin. C’est une histoire qui parle du mal : celui qu’on croit avoir en nous et celui que les gens peuvent nous faire subir. Qui est le diable dans cette histoire ?

ÉTÉ 96 (animation) de Mathilde Bédouet

4 étoiles

Paul se rappelle ses souvenirs de jeunesse lorsqu’un été, lui et sa famille se retrouvent pris au piège d’une presqu’île à cause de la marée. Ils passeront la nuit sur la plage.

L’animation a pour style celui des crayons de couleurs. Quoi de mieux pour réveiller les souvenirs de notre enfance. Tout est réfléchi, le nom de ce garçon, Paul, signifie petit. C’est le souvenir de notre enfance, quand on était petit. Un Paul qui n’est pas encore grand, qui a encore besoin de bouée gonflable pour nager. Mais pendant cette nuit, Paul apprendra à grandir. Égaré entre la réalité et le rêve, il se perd après être allé faire pipi au milieu de la nuit et tombe à l’eau. C’est là qu’il apprendra enfin à nager. L’histoire se termine avec Paul qui tient le gouvernail du bateau qui reconduit sa famille sur la terre ferme. Un souvenir fort de son enfance, peut-être même charnière, où il a fait un pas de plus vers le monde des adultes.

THERE IS NO FRIEND’S HOUSE (Où est mon amie ?) de Abbas Taheri

5 étoiles

Sara et Mehri, deux lycéennes iraniennes décident de boire de l’alcool en cachette dans leur établissement. Après s’être fait surprendre, la responsable de l’établissement va essayer de les couvrir, mais c’est sans compter l’intervention du père de Sara, un policier.

Tout est parfait dans ce court métrage : l’interprétation des actrices, l’écriture, la manière de filmer. Il est d’une efficacité redoutable et l’émotion se fraye un chemin droit vers votre cœur. C’est une histoire assez triste, ces deux jeunes filles, amoureuses l’une de l'autre, se jurent de ne pas se dénoncer si jamais elles se font prendre. Malheureusement, alors que cela avait bien commencé, le père de Sara, un policier trop zélé envers sa religion, arrivera à faire pression sur les faiblesses de sa fille pour qu’elle dénonce son amie. C’est un dilemme du prisonnier. Quelle noirceur se cache dans le cœur du père qui est prêt à briser sa fille par respect pour sa religion ?

Il y a tout un jeu sur la dissimulation : l’alcool qu’on dissimule pour le boire en cachette dans l’établissement, la directrice qui essaye de cacher cet acte grave, Sara qui a caché à Mehri que son père était policier, le père de Mehri qui tourne un film en secret, Sara qui range ses cheveux sous son voile à l’arrivée de son père… Le symbole est évident, dans cet Iran soumis à une folie religieuse, il faut désormais se cacher, on ne peut plus vivre librement. Un film magnifique qui dénonce des horreurs.

PLEURE PAS GABRIEL de Mathilde Chavanne

4 étoiles

Gabriel, un professeur de collège introverti qui souffre de dépression, réalise une molle tentative de suicide. Les pompiers l’emmènent à l’hôpital, et son colocataire, qui se soucie plus de sa nuit de sommeil, le laisse partir seul. C’est Margot, une belle voisine un peu alcoolisée qui l’accompagnera. C’est le début d’une rencontre amoureuse.

Gabriel et Margot sont deux âmes en peine qui survivent à leur détresse comme ils peuvent. Margot essaie d’atténuer cette souffrance avec l’alcool, Gabriel avec l’appel à l’aide de sa tentative de suicide. C’est en se rencontrant que ces deux personnes sensibles pourront s’apporter le bonheur qu’elles n’arrivaient pas à trouver dans ce monde hostile. Le choix du genre est très intelligent : il s’agit d’une comédie musicale. Les apparitions des moments chantés sont comme un baume au cœur qui vient guérir de la violence de ce monde par un peu de poésie. Le film peut aussi compter sur la prestation de ses deux acteurs pour lui donner cette formidable puissance émotionnelle. Tout simplement l’histoire de deux cœurs malades qui arrivent à guérir : comment ne pas être touché par cette histoire dans notre monde actuel ?

Yvan Coudron Envoyer un message au rédacteur