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deauville 2014 - Bilan
En décalé cette année d'une semaine avec le Festival de Venise, du fait d'événements hippiques, le privant ainsi naturellement de la venue de nombreuses équipes (et films) ayant fait le déplacement sur le Lido, le Festival de de Deauville 2014, auquel nous n'avons pu participer que les 5 derniers jours, n'a pour autant pas démérité, grâce notamment à une série d'hommages (Jessica Chastain, Ray Liotta, Will Ferrell...), et quelques avant-premières marquantes : « Deep sea challenge », le documentaire sous-marin de James Cameron, le réalisateur ayant dû se désister au dernier moment, « The november man » qui a permis au toujours très populaire Pierce Brosnan de revenir en Normandie, ou encore « Sin City 2 », suite très attendu, au graphisme toujours percutant.Des Premières attendues
Il y en avait pour tous les goûts cette année à Deauville, du dessin animé au film de guerre ou d'espionnage, en passant par les indispensables films culinaires ou biopics. Si Woody Allen n'a pas déchaîné les foules en ouverture avec "Magic in the moonlight", il aurait au moins fait souffler sur la normandie une dernière brise d'un vent d'été venu de Provence, offrant une comédie légère jouant délicieusement avec les apparences et les superstitions. Le film d'animation « The boxtrolls », passé par Venise, aura lui quelques peu déçu, invitant certes à la découverte de créatures étranges et organisées, mais restant limité côté scénario.
On ne peut pas dire que les drames aient particulièrement marqué les esprits. La bancale histoire d'amnésie développée dans « Avant d'aller dormir » avec Nicole Kidman était à la limite du risible quand au portrait, certes interprété avec talent par Mark Ruffalo, d'un père bipolaire, dans « Infinitely Polar Bear » il a eu bien du mal à passionner ou émouvoir. Côté Biopics, le résultat n'aura pas été bien plus joyeux. Repartie bredouille de Venise, la vision laborieuse (pour un film pourtant de seulement 1h20) des derniers jours du cinéaste "Pasolini" par un Abel Ferrara peu inspiré, n'aura pas marqué les esprits. Quant au biopic musical sur James Brown, « Get on up », s'il aura mis en lumière quelques interprètes talentueux et transmis son rythme à la salle, il reste bien trop sage pour prétendre aux futurs Oscars.
La bonne surprise sera finalement venue d'abord des films dits « culinaires ». D'abord avec la venue d'Helen Mirren, pour présenter le conte « Les recettes du bonheur », sympathique histoire de lutte entre un jeune cuisinier indien talentueux, et une patronne de restaurant plus traditionnel. Un film certes aux rouages classiques, mais qui donne du baume au cœur. Autre feel-good movie, le nouveau petit film de réalisateur de John Favreau, « #Chef », parcours de renaissance d'un cuisinier retrouvant le goût à la vie et à son métier en devenant vendeur ambulant. Drôle et porteur d'une vraie petite flamme.
Enfin soulignons également la présence d'un classique mais efficace film d'espionnage (« The november man »), d'un thriller psychologique situé dans les prisons de Guantanamo et interrogeant la relation gardien-prisonnier et apparence-vérité, au travers d'un saisissant face à face (« Camp X-Ray »), et surtout la présentation d'un des bijoux du dernier Festival de Cannes, le très troublant « The disappearance of Eleanor Rigby », ou les deux facettes d'une même histoire d'amour et de manque, avec Jessica Chastain et Jeam McAvoy tous deux formidables. L'amour qui n'abandonne jamais. L'amour avec un grand A.Une compétition toujours de qualité
Dans un contexte de grands Festivals toujours plus féroce, le Festival de Deauville 2014 a su à la fois piocher dans le meilleur ou le plus original des autres festivals (Berlin, Venise, Cannes...) tout en se ménageant de belles premières européennes.
Le Festival a donc été l'occasion de découvrir plusieurs remarquables thrillers. Avec le dernier Anton Corbijn, « Un homme très recherché », c'est la complexité de l'intrigue qui primait, ainsi que l'intensité de l'interprétation (c'était là le dernier film de Philip Seymour Hoffman). Avec « Cold in july » (« Juillet de sang »), découvert à la Quinzaine des réalisateurs, c'était plutôt le goût de la surprise et du retournement de situation, ce film à tiroirs, nous proposons une toute autre vision de la situation dans une seconde partie où le personnage menaçant s'allie au héros. Enfin, avec « Whiplash » c'est à du harcèlement moral que nous avons affaire, un jeune joueur de batterie devant faire face aux méthodes violentes d'un chef d'orchestre particulièrement sadique (le film a reçu le Grand Prix, après être passé par Sundance et lui aussi la Quinzaine des réalisateurs de Cannes).
Mais cette compétition nous a surtout alimenté en voyages intérieurs de personnages plus ou oins torturés. Si le personnages principal du nouveau Gregg Araki, « White bird », cherche à comprendre la disparition de sa mère, qui pourtant ne lui manque pas, ce sont ses réflexions intérieures que l'on suit, grâce à une voix-off finement écrite. Dans « I Origins » c'est le parcours d'un chercheur qui nous est donné à voir, oscillant entre rationalité et désir de croire en une possible réincarnation de l'être aimé. Dans l'insupportable « War story », ce sont les traumatismes d'une photographe de guerre jouée par Katherine Keener que l'on tente désespérément de toucher du doigt. Dans « Love is strange » c'est le quotidien désenchanté d'un couple âgé d'homosexuels qui nous est donné à voir avec une certaine sobriété, tentant de faire passer l'émotion liée aux récurrentes humiliations, par le silence plutôt que par l'abondance de dialogues. Enfin, « The better angels » proposait, dans un noir et blanc sublime, d'aborder la jeunesse campagnarde du futur Abraham Lincoln, grâce à une mise en scène proche de celle de Terrence Malick, capturant des moments de vie, de ceux qui finissent par structurer une personnalité.
« Jamie Marks is dead » proposait quant à lui une approche quelque peu originale de la persécution, proposant de suivre le fantôme d'un jeune homme retrouvé mort. En contact avec deux autres personnages, il révélera peu à peu ses souffrances et ses espoirs brisés. Le film n'était pas le seul OVNI présenté au festival, puisqu'on a pu aussi découvrir « It follows », film d'horreur venu de la semaine de la critique de Cannes, où des sortes de zombies suivent diverses protagonistes. Sachant qu'ils réussissent tôt ou tard à les retrouver, le spectateur finit lui aussi par guetter dans le cadre, le moindre indice de l'apparition de la bête... Flippant ! « A girl walks home alone at night » présentait également une étrange vision d'une société qu'on situerait volontiers au moyen-orient, dans laquelle une femme voilée enlève des hommes à la façon d'un vampire. Une parabole qui demande éclaircissement.
Pour terminer, inclassable parmi ces quelques tendances, « The good lie » histoire d'immigration d'une (supposée) fratrie depuis le Soudan, s'il est plein de bonnes intentions, n'arrive pas à dépasser le cadre très lisse de son sujet, pour proposer une vision cinématographique. Le film se regarde comme un honnête reportage et peine à provoquer l'émotion.