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Cannes 2017

cannes 2017 - Des migrants au coeur de l'actualite

Devenue une thématique incontournable du fait de l’actualité, le sujet des migrants, de leur rejet irraisonné ou masqué, ou leur accueil généreux, était central dans bon nombre de films cannois cette année.

Le film hongrois "Jupiter's moon" aura sans doute été celui traitant le plus directement du sujet. Retraçant le parcours d’un jeune homme ayant traversé les Balkans et découvrant à la suite d’une blessure qu’il peut soudain léviter, le film saisit dès le départ par sa représentation des cortèges de réfugiés, cheminant en colonnes interminables et franchissant une frontière devenue danger. Avec un certain onirisme, cette œuvre fascinante aborde à la fois la corruption, la tentation d’exploiter les plus pauvres, les amalgames terroristes et le respect de individus.

Reparti avec le prix d’interprétation pour Diane Kruger, "In the fade" de Fatih Akin s’attaquait frontalement à la question du terrorisme visant la communauté turque d’Allemagne. Se muant rapidement en portrait d’une femme qui a tout perdu, le film pose la question du désir de vengeance, de l’utilité de l’oeil pour œil dent pour dent, mettant en en exergue la xénophobie grandissante et l’ombre d’une Europe gangrenée par les nationalismes. Un grand numéro d’actrice pour un triptyque saisissant.

Plus tourné vers la question de l’intégration, "Avant la fin de l'été", semi-documentaire présenté à l’ACID, se focalise sur trois jeunes iraniens venus vivre en France, dont l’un a décidé de rentrer au pays. S’organisant un dernier voyage estival avant son départ, les trois amis échangent sur les raisons de leur amour ou désamour pour notre pays, la réalisatrice provoquant de charmantes frictions avec la culture ou les filles d’ici. En filigrane apparaît avec intelligence à la fois le mal du pays et la terrible peur de perdre à nouveau une certaine liberté. Un film émouvant et joliment attachant.

Enfin en séance spéciale, le documentaire signé de l’actrice Vanessa Redgrave, "La douleur de la mer" (Sea Sorrow) s’attachait à défendre justement cette idée de la liberté, livrant face caméra des témoignages de migrants et montrant la détresse autour de la Jungle de Calais. En demandant à des acteurs connus (Emma Thompson, Ralph Fiennes) d’intervenir pour lire de vieilles lettres ou jouer des morceaux de pièces de théâtres, elle dessine un parallèle inquiétant entre l’époque actuelle et les périodes les plus noires de l’Histoire de l’Europe (l’avant Seconde Guerre Mondiale, l’exil des Hongrois en 56…). Un film dont les avertissements résonnent encore longtemps après la projection.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur