RIVIÈRE

Un film de Hugues Hariche

T’es hockey, t’es bath, t’es in

Manon Rivière, 17 ans, part seule de Suisse et débarque à Belfort où vit son père, qui l’a abandonnée quand elle était enfant. Rêvant de devenir hockeyeuse professionnelle, elle tente de se reconstruire socialement et psychologiquement…

Rivière film movie

Incarnée par l’excellente Flavie Delangle ("Stella est amoureuse"), l’héroïne éponyme de "Rivière" porte une part de mystère (le choix du patronyme plutôt que du prénom pour le titre entretient d’ailleurs cela) : souvent taiseuse et pudique, Manon observe et rumine, attendant les moments opportuns et les personnes adéquates pour révéler sa personnalité, par touches parcimonieuses. C’est ainsi qu’elle séduit les autres personnages et aussi le public.

Le film ne manque pas d’intérêts : un personnage féminin indépendant qui s’affirme face à tout type d’adversité (dont la pratique du hockey avec des garçons à qui elle tient tête) ; la question des limites acceptables pour atteindre un haut niveau sportif (avec la patineuse artistique interprétée par Sarah Bramms, elle-même ancienne patineuse découverte en 2017 dans "Kiss & Cry") ; la notion de confiance en l’autre (qui plus est pour une jeune fille qui a été abandonnée) ; l’expression et l’acceptation du désir ; ou encore, plus secondairement, le relatif désœuvrement d’adolescents dans une ville moyenne comme Belfort.

Si le premier long métrage de fiction de Hugues Hariche est loin d’être un échec, il pèche tout de même par sa volonté de concilier toutes ces thématiques. Cela donne notamment le sentiment que le réalisateur hésite sur ce qu’il souhaite développer concernant le personnage principal (la recherche du père, la relation avec la patineuse, l’ambition sportive), même si cela illustre sans doute la psychologie d’une ado en quête de repères et de stabilité. S’ajoutent quelques perplexités face à plusieurs scènes ou détails (des réactions parfois difficilement compréhensibles, des personnages qui occupent n’importe quel lieu n’importe quand…), ainsi qu’un rythme trop plombant.

En outre, "Rivière" passe peut-être après trop de films du même type pour susciter une pleine adhésion. On peut par exemple avoir l’impression de regarder un film de Céline Sciamma, dont on retrouve plusieurs marqueurs (ce qu’accentue même la BO électro planante de Nicolas Rabaeus). La comparaison peut être vue comme un bon signe, mais il est également ardu de soutenir un tel parallèle. Cela peut toutefois fonctionner à merveille durant les séquences les plus inspirées, comme celle où les deux jeunes filles comparent leurs corps meurtris. Reste un beau portrait d’adolescente dans toute sa complexité, entre ombre et lumière.

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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