L'ESPRIT COUBERTIN
Le sport ne fait pas tout
En 2016 lors des qualifications pour les JO, Paul, champion du monde de tir, avait raté le coche à cause d’une mononucléose. En 2020 du fait du Covid il n’avait pas non plus pu participer aux jeux de Tokyo. Mais cette fois-ci, en 2024, aux Jeux Olympiques de Paris, il compte bien faire la différence, l’emporter et faire la fierté de son défunt père. Mais c’est sans compter sur le fait qu’au village olympique, il va devoir côtoyer les autres athlètes et surtout partager sa chambre avec un nageur, d’une petite île méconnue…
Premier long métrage de Jérémie Sein, présenté en compétition au dernier Festival du film de comédie de l’Alpe d’Huez, "L’Esprit Coubertin" est en réalité le portrait d’un sportif surdoué, mais resté une sorte d’adolescent attardé, l’enjeu étant de savoir si le contact avec des jeunes de son âge va parvenir à fissurer sa carapace, au risque de bousculer son équilibre de champion. Il faut que le garçon va être autant perturbé par les choses du sexe (il se caresse avec sa boule vibrante anti stress...), par sa relation fantasmée avec sa coach (Emmanuelle Bercot, épatante), que bousculé par son coloc séducteur et par l’ambiance festive qui ravive ses frustrations (le son qui augmente en même temps que celles-ci, les 23 préservatifs mis à disposition dans sa chambre...).
Prometteur au niveau de la caractérisation des personnages et de la drôlerie cynique ou décalée des situations, le scénario, co-écrit entre le metteur en scène, Mathias Gavarry et Fanny Burdino lance aussi bien de petits pics aux sportifs (le niveau de leurs discours...), aux commentateurs, aux « images exceptionnelles », aux organisateurs et communicants (Grégoire Ludig en accueillant des délégations au village des athlètes vaut son pesant d’or), aux politiques (l’apparition d’Aura Atika en Ministre des sports), qu’aux pays participants (la débâcle pour la France, mais aussi la Belgique, l'Espagne...).
Si l’imagination passe aussi par la mise en scène (un grand moment : la vision érotisée du personnage se rêvant en porte-drapeau...) que par la mise en avant d’un contexte politique lié au dérèglement climatique ou au racisme, le film doit avant tout énormément à l’interprétation magistrale de Benjamin Voisin ("Illusions perdues", "La Dernière Vie de Simon", "Été 85"), rigide comme un piquet, austère à souhait lorsqu’il est perturbé, maniaque dans ses rituels d’entraînement... Un film qui rappelle, à quelques semaines maintenant des véritables JO de Paris 2024, que « l’important c’est de participer », mais aussi que les athlètes se doivent de profiter de leur jeunesse et de vivre, ceux-ci n’étant pas ici juste dans un esprit comme celui de l'asocial Paul au départ (« on vient on gagne on s’en va »), mais de communion avec d’autres nationalités et personnalités, forcément différentes.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur