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QUE NOTRE JOIE DEMEURE

Un film de Cheyenne Carron

« Pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font »

Les évènements précédant l’attentat de l’église de Saint Étienne du Rouvray le 26 juillet 2016, commis par deux terroristes islamistes…

Les films traitant d’attentat terroriste ou de tuerie de masse se font rares. Sujet sensible par excellence, il est difficile pour ceux qui s’en emparent de garder le sens de la mesure et une certaine distance critique indispensable à la compréhension des évènements. Gus Van Sant, pour ne citer que lui, a réussi avec brio cet exercice, son film "Elephant" ayant même été récompensé d’une palme d’or en 2003.

Cependant les motivations et le mode opératoire des protagonistes de Gus Van Sant sont très différents de ceux des terroristes de Saint Etienne du Rouvray. Ce qui tend à prouver que chaque attaque de ce genre est un cas à part, et nécessite donc un traitement particulier. Dans "Que notre joie demeure", Cheyenne Carron envisage la chose comme le télescopage de deux individus. D’un côté Jacques Hamel, prêtre de la paroisse de Saint Étienne du Rouvray, pratiquant sa religion avec rigueur mais tolérance. Et de l’autre Adel Kermiche, jeune homme révolté par les injustices subies au Proche Orient et qui trouve dans l’islam un moyen de canaliser sa colère.

Peu importe que les protagonistes soient musulmans ou chrétiens, ou même athées, ou bouddhistes. Ce qui s’oppose ici ce sont deux manières de vivre sa spiritualité. En ce sens le père Hamel a plus de traits communs avec l’imam que l’on voit dans la première scène du film, qu’avec une de ses paroissiennes qui éprouve quelques réticences à accorder son pardon aux terroristes. C’est pourtant ce qu’enseigne sa religion : « pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ».

Cheyenne Carron ne tombe pas non plus dans le piège de la binarité simple. Chacun à sa propre spiritualité, il en existe autant qu’il y a d’individus. Cette multiplicité des points de vue donne lieu à de nombreux débats raisonnés et argumentés. Chose qui manque cruellement dans la sphère publique de nos jours. Qui a raison et qui a tort ? Ici le meurtrier a exactement droit au même traitement que la victime. Au point que, à l’instar d’un débat politique, le temps de parole semble strictement chronométré. La réalisatrice n’oriente en rien le choix du spectateur. Mais il ne peut y avoir d’ambiguïté. Ni la colère, ni les convictions religieuses ne peuvent justifier un meurtre.

Benjamin BidoletEnvoyer un message au rédacteur

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