QUELQUES JOURS PAS PLUS
Quelques défauts pas plus
Arthur est plus habitué aux articles musicaux qu’à traiter de l’actualité. Mais suite à certains de ses excès, sa direction l’envoie couvrir une manifestation contre la fermeture d’un camp de migrants. Blessé à la tête, il fait la rencontre d’une militante, Mathilde, auprès de laquelle il s’engage à accueillir un jeune afghan. Si sa générosité était surtout conditionnée à un jeu de séduction, le journaliste va vite découvrir un autre monde…
Sur le papier, "Quelques jours pas plus" avait tout pour agacer : un sujet sérieux traité par le prisme de la comédie, une ancienne directrice de casting qui s’essaye à la caméra pour adapter le roman de son conjoint, une thématique sociétale bien dans l’air du temps (la question des migrants), une célébration questionnable du vivre ensemble à la française, avec une actrice populaire (Camille Cottin) et un comédien garant du message et des valeurs de gauche (Benjamin Biolay). Les premiers instants semblent confirmer nos a prioris : la mise en scène est inexistante, l’intrigue se focalise sur un bobo, critique musical, qui après avoir saccagé une chambre d’hôtel se voit obligé de traiter l’actualité politique pour son employeur, à savoir une manifestation contre la fermeture d’un camp de migrants. Évidemment, tel un nigaud, celui-ci sera blessé, rencontrera une très belle femme et par souci de séduction acceptera de lui rendre service pour exister à ses yeux. Soit le postulat d’un mauvais boulevard contemporain.
Cependant, comme le dit l’adage, il ne faut pas se fier aux apparences. Et le long métrage de Julie Navarro révèle nettement plus de surprises que ne le laissait penser cette ouverture maladroite. Car si la romance entre les deux protagonistes va bien être une intrigue sous-jacente, elle ne sera pas le cœur du film, le scénario préférant se focaliser sur l’accueil d’un jeune afghan par ce journaliste désinvolte et cynique. De là, naît une relation étonnamment touchante, où les deux individus s’apprivoisent sans pour autant sombrer dans les clichés. Oui, cette situation va chambouler le quotidien du personnage principal, interroger sa famille et ses proches, mais dans une juste mesure, dans une forme humaniste moins naïve qu’annoncée initialement. Et lorsque cette comédie dramatique décide de regarder les dérives de notre société, de la difficile existence des associations pro-migrants aux violences policières, elle le fait frontalement, sans bafouiller, à l’image de ce discours dans une salle de classe.
Porté par l’alchimie du duo star, cette première réalisation s’appuie sur un charme certain et une velléité forte à retranscrire le réel, permettant à l’ensemble de ne pas sombrer dans l’écueil de l’œuvre de bonne conscience, où les étrangers sont réduits à des faire-valoir pour nos représentants hexagonaux en quête de rédemption morale. Si un effet de déjà-vu gonfle au fur et à mesure des minutes, en particulier dans le dernier tiers, beaucoup trop convenu, "Quelques jours pas plus" demeure un film tendre et éloquent sur un canevas pas si simple à appréhender tant celui-ci est rabâché par de nombreux cinéastes. Pas une révolution. Mais une belle maîtrise !
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur