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Clermont-Ferrand 2024

Festival de Clermont-Ferrand 2024 - retour sur le Programme F8

POURQUOI AS-TU LAISSÉ LE CHEVAL A SA SOLITUDE ? de Faouzi Bensaïdi

2 étoiles plus

Lors d’un tournage dans le désert, l’équipe n’arrive pas à tourner un plan à cause d’un cheval fatigué qui n’arrive pas à galoper. Un médecin est appelé pour faire une piqûre à ce cheval.

À travers cette brève histoire, où l’on aperçoit que très rarement des visages, on dénonce la cruauté dont peut faire preuve le cinéma et plus généralement un être humain. Les seules personnes dont on aperçoit un tant soit peu le visage sont les garçons de l’abattoir qui ont fourni le cheval. Ce sont d’ailleurs eux qui, à la fin de l’histoire, libéreront le cheval pour le laisser galoper en liberté plutôt que de le ramener à l’abattoir.

SUPERNOVA de Leslie Lagier

4 étoiles

Basile, 17 ans, un activiste venu taguer l’entrepôt d’une multinationale qui veut raser une forêt pour créer un super-entrepôt, se fait arrêter par Malik, 19 ans, agent de sécurité. Une amitié se tisse progressivement entre les deux jeunes hommes.

Lorsqu'on voit un court-métrage de plus de 40 minutes dans un programme, on craint le pire. C’est souvent un format moins apprécié par le public, car la longueur révèle plus facilement les défauts d’écriture. Heureusement, ce film ne souffre aucunement de tels défauts.

Malik, le vigile, est un jeune homme bien content de s’être trouvé un métier où il peut passer sa journée à lire des livres d’astronomie, se perdant ainsi dans les étoiles alors que sa réalité le maintient pris au piège à l'image du format 4:3 du film. Il s’évade par la pensée, à l'aide d'une voix-off qui réussit à nous emporter dans son introspection.

Malik se lie d’amitié avec cette « tête à claques » qui lui rappelle son frère. Un frère dont on apprendra la mort plus tard. En réalité, même si le film essaie de nous induire en erreur, on sait d’avance que ce frère est mort, mais cela n'enlève rien à l’émotion ressentie car si ce film a bien une force, c’est de savoir décrire des moments d'humanité poignants.

On pourra cependant trouver dommageable l’ouverture du film qui nous montre ces deux jeunes garçons se dire au revoir avant même qu’ils se soient rencontrés. L’idée de cette chronologie inversée n’est pas claire et ne fait qu’introduire un peu de confusion auprès du spectateur.

AU 8EME JOUR de Flavie Carin, Elise Debruyne, Théo Duhautois, Alicia Massez et Agathe Sénéchal

3 étoiles plus

Que se passe-t-il après les sept jours de la création du monde ? En un jour, il est détruit.

C’est une fable, il n’y a pas de personnages, ni particulièrement d’histoire, tout est dans la démarche artistique. Pour symboliser la fragilité de notre monde et l’interconnexion de nos actions, ce film est animé à partir de fils de laine. Un fil de laine, c’est un lien fragile : le symbole est là. Ce monde palpable que tissent ces fils de laine nous semble terriblement fragile : l’effet a pris sur nous.

Nous sommes dans une nouvelle ère où, petit à petit, de nouveaux récits apparaissent, peut-être même pourrait-il émerger un nouveau genre qui porterait sur l’écologie. Aujourd’hui, nous ne sommes qu’au tâtonnement et ce genre de film doit faire des choix, car il est difficile d’aborder ces questions écologiques avec le public. Ici, ce film a fait le choix d’impressionner son public, de le bluffer artistiquement, pour lui laisser une marque qui peut-être apportera sa pierre à l’édifice.

NA MAREI (L’invisible) de Léa-Jade

3 étoiles

En Afghanistan, une famille travestit sa fille aînée en garçon. Zaid va à l’école et apprend la poésie, il aide sa famille dans les tâches du quotidien, ce qu’une femme ne pourrait pas faire. Aspirant à aller à l’université, il doit affronter sa famille qui a décidé de la marier.

Ce film qui nous parle d’un monde loin de nous, nous fait découvrir des choses impensables, comme une famille qui travestit sa fille en garçon pour qu’elle puisse les aider en allant faire les courses dehors (les femmes ne peuvent sortir sans être accompagnées), la situation étant vite compliquée lorsqu’un père de famille a eu deux ou trois filles. À l’image de cette liberté qui a été donnée à l’Afghanistan lors des interventions américaines après le 11 septembre puis reprise par les talibans lorsqu’ils ont quitté ce pays, les parents de Zaid lui donnent la liberté d’être un homme avant de la lui reprendre. Triste métaphore. Que peut-on attendre d’un film qui prend place en Afghanistan que de nous parler de femmes et de liberté ? Et ce film nous en parle avec intelligence et subtilité.

DOM JUAN de Hekuran Isufi

2 étoiles

Un escroc et son ami, Ayman et Bilel, volent et arnaquent dans la rue. Petit à petit, ils accumulent les ennuis.

Ce film souffre malheureusement de plusieurs problèmes d’écriture : à part un premier coup de téléphone où l’on nous montre Ayman un peu dragueur, sans que cela n’ait aucune conséquence sur la suite de l’histoire, pourquoi appeler ce film Don Juan ? Peut-être pour faire un lien avec ces appels à la prière venant du ciel, car dans Don Juan, le ciel le rappelle pour ses mauvais comportements. Mais est-ce que cet élément de comparaison est suffisant pour nommer le film ainsi ? C’est une autre question. Il faut aussi noter que le personnage de Don Juan possède quand même un charme capable de séduire le public. Malheureusement, ici, l’auteur qui souhaitait dénoncer des comportements destructeurs ne nous offre à voir que des personnages monodimensionnels et antipathiques qui ne favoriseront pas l’identification du public.

Pour finir, le film termine en queue de poisson : [ATTENTION Spoiler] Bilel, l’ami de Ayman, n’est qu’une illusion, lors d’une bagarre finale, tous les personnages disparaissent, car tout cela sort de la tête d’Ayman. Mais lorsqu’on choisit une fin où tout n'était qu'illusion, il faut laisser des indices, préparer le terrain, ce que ce film n’aura pas su faire. Au final, ce sont trop de problèmes d’écriture qui nuisent à l’histoire.

Yvan Coudron Envoyer un message au rédacteur