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HORS SAISON

Un film de Stéphane Brizé

D’impossibles retrouvailles

Mathieu, acteur parisien, vient de plaquer les répétitions de sa première pièce de théâtre. Il débarque dans un hôtel d’une cité balnéaire de l’Ouest de la France, hors saison, pour s’isoler et suivre une cure de thalasso. Là, son arrivée dans la petite ville n’étant pas passée inaperçue, il retrouve par hasard Alice, italienne installée en France, avec laquelle il a eu une histoire d’amour quinze ans auparavant…

Nouveau film du prolifique Stéphane Brizé ("Je ne suis pas là pour être aimé", "Mademoiselle Chambon"), co-écrit cette fois-ci avec Marie Druker (qui interprète d’ailleurs, si vous tendez l’oreille, la femme de Guillaume Canet dans le film, dont vous n’entendrez que la voix au téléphone), "Hors Saison" navigue avec élégance entre drame et comédie, à l’image des soubresauts du moral de ses personnages. Débutant avec l’arrivée dans un centre de thalasso de Mathieu, acteur de cinéma célèbre mais en pleine remise en cause, le film s’imprègne d’emblée du caractère désertique et silencieux de l’hôtel et des environs, dont la pâleur des teintes ne trompe pas. Mais c’est ensuite au travers d’un doux équilibre entre des moments de comédie (la machine à café - moderne mais incompréhensible dans son fonctionnement -, le soin surprenant pour ses jambes, les demandes incongrues de selfies du personnel de l’hôtel, les remarques de sa femme au téléphone sur les rôles qui lui sont proposés...) et des passages plus difficiles, entre souvenirs et regrets, que s’installe l’homme, comme le film, dans cette retraite désirée.

La torpeur du personnage, qui semble écrasé par ses interrogations existentielles, c’est une ancienne relation qui vit là (interprétée avec retenue et luminosité par Alba Rohrwacher), avec aujourd’hui mari et enfant, qui va l’en sortir. En évoquant progressivement leurs présents individuels, puis leur passé commun, le scénario aborde ainsi les chemins parcourus par chacun et les séquelles d’une rupture qui n’en fut pas vraiment une, et qu’il faut désormais rejouer si l’on souhaite refermer définitivement certaines blessures. Dans une mise en scène plutôt inhabituelle pour Stéphane Brizé (il utilise notamment des cartons pour signifier les messages sur téléphone, ou insère quelques vidéos...), le réalisateur casse un peu le rythme de ce drame sur la séparation et le droit ou non à se retourner sur ses choix, professionnels comme privés.

Si certains seront peut-être désarçonnés par les passages concernant l’amie âgée au mariage de laquelle doit se rendre Alice (prénom du personnage mais aussi clin d’œil à la sœur d’Alba, elle-même réalisatrice), ils s’avèrent cependant signifiants d’un droit à vivre en amour et constituent une source supplémentaire d’émotion. Relancée par un très beau thème musical signé Vincent Delerm, qui a même composé une chanson intitulée "Ni Avec Toi Ni Sans Toi" pour le film, l’émotion affleure en permanence, à l’image de ces souvenirs de personnes que l’on porte longtemps et qui reviennent à la surface ponctuellement. Elle fait de "Hors Saison" un très beau film sur la nécessité de réparer certaines choses, mais aussi de savoir respecter les choix de l’autre et surtout se dire adieux.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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