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REINAS

Retarder le départ par quelques bouffées de liberté

Pérou, 1992, alors que la crise frappe avec une inflation sans précédent, et que le couvre feu a été instauré, Elena prépare son départ avec ses deux filles, Aurora, adolescente, et Lucia, encore enfant, pour les États-Unis. Mais il lui faut pour cela obtenir la signature de leur père, Carlos. Débarqué « de la jungle », le retour de celui-ci dans la famille est plus ou moins apprécié. Mais ses filles, qu’il surnomme ses « reines », après quelques hésitations, lui font un bel accueil et sont contentes de pouvoir passer du temps avec lui…

"Reinas" est une chronique familiale douce amère, qui met en scène des moments, en apparence anodins, de complicité entre un père et ses deux filles, l’une adolescente, l’autre encore enfant. Mais derrière ces instants de proximité peu évidents au début, le père ayant été longtemps absent, c’est un enjeu vital qui se joue, avec le possible départ de celles ci avec leur mère à l’étranger, et donc une sorte de guerre faite de non dits entre la mère et le père. Ne portant aucun jugement sur ce père, dont les histoires viennent emplir le quotidien de rêves d’aventures, c’est cependant la question de la responsabilité de celui-ci qui est finalement posée, au-delà de sa capacité à entretenir un véritable lien avec ses filles.

La mise en scène pose en tout cas l’énergie du personnage comme une donnée de base, alors qu’il raconte des histoires de crocodiles et de voiture qui explose à des convives qui ne semblent pas vraiment le croire, puis lorsqu’il emmène les filles à la plage sur des airs de "Canary Bay" d’Indochine, avec des propositions de surf et de virée en 4x4 dans les dunes. Le père devient ainsi un tourbillon de possibles face à une mère qui représente le sérieux (la signature de leur autorisation de départ) et l’ordre. Et naturellement ses filles ne peuvent qu’être séduites par l'impression de liberté qu'il leur offre dans une société qui se referme peu à peu, avec une nouvelle dictature. Un sentiment qui est partagé avec le spectateur, grâce un habile scénario, qui derrière des moments lumineux, finit par faire apparaître la vraie situation, autour d'un barrage de police, qui va initier la réalité de la présence policière. Une manière sans doute de montrer la pression d'un régime, à hauteur d'enfants, entre leur insouciance quotidienne et leur ignorance de ce que veut dire « rester ».

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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