PIERRE FEUILLE PISTOLET
Vers l’espoir, malgré tout
Maciek Hamela roule avec son van, venu de Pologne, prenant à son bord des passagers en détresse. Il participe à l’évacuation de familles ukrainiennes qui fuient la guerre déclenchée par la Russie…
Découvert du côté de la section ACID du dernier Festival de Cannes, ce documentaire saisissant permet de mesurer le mélange de détresse et d’espoir qui anime les passagers de Maciek Hamela, à la fois réalisateur et chauffeur du véhicule. Au fil des discussions, des confidences, c’est l’élan de vie qui prévaut et l’émotion. Débutant principalement sur des plans depuis le véhicule, sur des paysages alentours ou sur la route parcourue (pour mieux en montrer les obstacles, comme ces mines qui obligent rapidement à faire demi-tour), le rétroviseur sert progressivement de lien entre celui qui écoute (le chauffeur) et ceux qui expriment leur désarroi, parfois avec difficultés (les passagers). Le film, par son montage, se fait alors cocon protecteur, à l’image du van, slalomant dans des lieux dangereux, évitant d’ajouter à la détresse par un réalisme sur le conflit qui débutait alors, que seuls les observateurs extérieurs pouvaient alors exprimer.
L’émotion naît ainsi de l’expression des rêves d’installation ailleurs, en sécurité (l’une voudrait ouvrir un café…), de la sensation d’une guerre supposée durer peu de temps et permettre un retour que l’on sait - nous spectateur - , impossible à court terme. Elle naît aussi de l’urgence (une passagère blessée à transporter…) et du regard plein d’incompréhension des enfants, occultant naturellement la dure réalité, comme des pauses dans ces dialogues pour montrer un pays dévasté (pont éventré, maisons bombardées, tank calciné...). Empreint d’une angoisse sourde, "Pierre Feuille Pistolet" permet aussi d’incarner les violences subies par les civils en Ukraine (enlèvements, interrogatoires, enrôlement de force…) pour mieux se rendre compte de la réalité d’un conflit aux chiffres dors et déjà effrayants : 15 millions de déplacés, soit plus d’un tiers de la population du pays.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur