Festival Que du feu 2024 encart

ACIDE

Un film de Just Philippot

Une pluie de références et de clichés éculés

Michal, syndicaliste chevronné, pète les plombs lors d’une manifestation dans son entreprise. A bout, il agresse violemment un CRS et, finalement arrêté, il est placé sous contrôle judiciaire… Au loin, de menaçants nuages noirs remplis de pluies acides font route vers le Nord de la France…

Acide film movie

Dans la continuité de son précédent film "La Nuée" (2021), Just Philippot retrouve le cinéma qu’il affectionne particulièrement : le film catastrophe écologique. Avec "Acide", qui raconte comment une famille tente d’échapper à une pluie mortelle, il recycle son propre court-métrage de 18 minutes, qui était sorti dans le film à sketches "4 Histoires fantastiques" en 2018, en y ajoutant une belle tête d’affiche, Guillaume Canet. Malheureusement, le résultat n’est pas à la hauteur de son précédant métrage. Alors que "La Nuée" se distinguait par l’originalité de son histoire et du traitement, loin des poncifs du genre, "Acide" est un film d’action brouillon, qui se noie en citant pléthore de films catastrophes américains et en oubliant l’essentiel : bâtir un scénario original et un tant soit peu crédible.

Et cette déconvenue commence dès le début avec une introduction musclée qui permet de découvrir le personnage principal interprété par Guillaume Canet dans un contexte social tendu. On se dit que l’histoire ne va pas seulement tourner autour de la question écologique mais creusera aussi un fond sociétal bienvenu. Las ! Cette référence en restera là et ne sera plus jamais abordée (mais pourquoi ?). Quant aux personnages principaux, ils demeurent assez caricaturaux. Cette famille confrontée au pire représente le parfait modèle pour des films de catastrophes naturelles américains : une cellule décomposée, où le couple séparé se partage la garde de leur enfant, avant de se retrouver réuni face à une catastrophe naturelle majeure : le schéma typique des films "2012" ou "San Andreas" par exemple.

Autres références américaines : l’ambiance de "Phénomènes" de M. Night Shyamalan qui plane sur tout le film, avec ses effets de dramatisation comme le vent dans les arbres (bouh ça fait peur). On pense aussi fortement à "La Guerre des Mondes" avec la scène des corps fumants dans la rivière… (ici risible) et quand la population concernée par les pluies acides fuit en masse telle des migrants climatiques. Mention spéciale aux scénaristes qui n’ont pas dû briller en géographie car au lieu de les envoyer se réfugier loin de ce microclimat pluvieux, ils les envoient dans le Nord-Est de la France, bien connu pour son climat méditerranéen sec… Une petite dernière pour la route : "Le Pic de Dante" pour la scène du champ acide renvoyant directement à celle du lac de lave où la grand-mère y laissait la vie…

De la même manière que certains de ses cousins américains, le french "Acide" veut en mettre plein la vue et en oublie que le spectateur attend aussi une histoire crédible, haletante et angoissante ! Car n’en déplaise à ses détracteurs (!), reconnaissons au film une certaine réussite dans les effets spéciaux et même dans la volonté de se détacher de certaines ficelles scénaristiques hollywoodiennes qui voudraient qu’on épargne les animaux et qu’on finisse par un happy end. Mais l’acide ascorbique (vitamine C) du scénario qui permet aux spectateurs de ne pas s’endormir ne peut parvenir à cacher les lacunes (film tout public, zéro horreur) et les grosses ficelles (mais pourquoi les pneus des voitures n’éclatent-ils pas ?).

Au final "Acide" nous laisse un goût amer, entre quelques fulgurances qui arrivent au compte-goutte et surtout ce sentiment de gâchis à cause d’un scénario qui nous balade dans une constante irréalité avec certaines situations et certains personnages des plus idiots. Le long-métrage n’arrive même pas à nous proposer une œuvre engagée sur le front du combat contre le réchauffement climatique. Dommage, l’originalité du sujet et le traitement sombre du film faisaient espérer un meilleur résultat. Souhaitons à Just Philippot qu’après la pluie, il retrouve le beau temps…

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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