LE NOUVEAU JOUET
Jouer n’est pas gagner
Sami Chérif enchaîne les plans galères et les coups foireux alors que ses dettes s’accumulent et que sa femme va bientôt accoucher de leur premier enfant. Alors qu’il trouve un emploi de gardien de nuit dans un grand magasin, le fils du patron débarque pour se choisir un cadeau d’anniversaire et réclame Sami comme jouet…
Il y a près d’un demi-siècle (oui, le temps passe vite !), Francis Veber sortait son premier film en tant que réalisateur, "Le Jouet", avec Pierre Richard et Michel Bouquet. Alors que Richard Donner en a livré un affligeant remake américain cinq ans plus tard ("Le Joujou"), voilà que James Huth ("Brice de Nice"…) a décidé de ressusciter ce scénario pour tenter de le mettre au goût des années 2020.
Bien que cette nouvelle version s’écarte de l’originale sur un certain nombre d’aspects, les scènes-clés restent globalement les mêmes et on retrouve aussi certains des gags les plus emblématiques du film de Veber (par exemple le constat avec la voiture-jouet, ou le dialogue entre l’homme d’affaire et ses deux jardiniers).
Peut-être ce "Nouveau Jouet" sera-t-il plus efficient sur une génération qui ne connaît pas "Le Jouet", car c’est surtout l’indifférence qui domine pour ceux qui ont les références et s’ennuient donc dans les grandes largeurs face à cette pâle copie. Par ailleurs, le décalage entre le Maghrébin des banlieues et l’homme d’affaire a un arrière-goût de déjà-vu façon "Intouchables".
Heureusement, Jamel Debbouze n’essaie pas d’imiter Pierre Richard et fait du Debbouze dans le texte, s’appropriant donc le personnage avec une certaine réussite, y compris dans les quelques moments lorgnant vers plus d’émotion. De son côté, Daniel Auteuil n’a pas à rougir de la comparaison avec Michel Bouquet, car il parvient lui aussi à retranscrire la froideur de son personnage. En revanche, la plupart des personnages secondaires sont bâclés, soit parce qu’ils sont sous-utilisés (comme ceux incarnés par Atmen Kélif et Anna Cervinka), soit parce que l’interprétation laisse à désirer, à l’image d’une Alice Belaïdi que l’on a connue plus inspirée. Quelques protagonistes permettent toutefois quelques gags sympathiques, comme le majordome Jean-Louis (incarné par Salim Kissari), que Sami ramène constamment à ses véritables origines (maghrébines).
Malgré la fadeur de l’ensemble, on parvient donc à rire un peu, ou à apprécier la volonté d’insérer quelques autres références, comme un clin d’œil probable (et fugace) au "Kid" de Chaplin lors d’une scène de bagarre dans la cité, ou l’utilisation du roman "Le Baron perché" d’Italo Calvino comme comparaison avec la situation de ce gosse de riche qui, comme dans le film de Veber, passe progressivement d’agaçant à attachant. Mais sur l’ensemble, il faut bien se rendre à l’évidence : ce remake n’apporte pas grand-chose.
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur