RESTE UN PEU
Une surprenante proposition qui interroge sur notre appartenance
Gad Elmaleh, issu d’une famille marocaine juive séfarade, a passé son enfance à Casablanca où il avait interdiction de rentrer dans les églises. Revenant de 3 ans passés aux États-Unis, il rend visite à ses parents à Paris et accepte de dormir une nuit chez eux, avant de rejoindre son hôtel. Mais alors qu’elle fouille dans ses affaires, sa mère découvre dans sa valise, enveloppée dans un pull, une statuette de la Vierge Marie…
Inspiré de ses propres questionnements sur ses aspirations spirituelles, "Reste un peu", présenté en ouverture du Festival de Sarlat, est une comédie intimiste, jouant intelligemment avec des aspects documentaires, puisqu’elle convoque au casting toute la famille de Gad Elmaleh, à l’exception de son frère Arié. Drôle quand il faut, on est loin du personnage d’humoriste que l’on connaît, même si son métier est bien celui-là et qu’on perçoit sa verve usuelle lors de passages où il accepte de faire le show, pour ses amis, sur une petite scène. Mais l’écriture est ici moins orientée représentation, jouant de comique de situation, utilisant les propres mots de ses propres (et parfois des cris du cœur, comme lorsque sa sœur lui dit qu’il a toujours « pris toute la place dans cette famille », notamment concernant l’inquiétude des parents ou leur fierté) afin de donner corps aux réactions que provoquent son parcours religieux vers une potentielle conversion au catholicisme.
Provoquant un séisme chez certains (parents, amis...) et de l’interrogation chez des rabbins comme chez des prêtres, l’introspection de cette homme qui fait une « crise de la cinquantaine » un peu à part, nous pousse à questionner notre appartenance à une communauté et la réalité du choix de la religion ou de l’athéisme offerte aux enfants par leurs parents. Les parents de Gad sont particulièrement touchants, dans leur prévenance comme dans leurs réactions parfois excessives, sa mère volant, comme il le dit lui-même, la vedette a tout le monde. Quant au personnage secondaire le plus croustillant, celui du vieux monsieur qu’aide une catholique convaincue qui entraîne Gad dans sa suite, il dispose de dialogues aiguisés qui provoquent forcément le sourire.
Comme gentiment Gad Elmaleh s’amuse d’incohérences, de contradictions ou de complications introduites par les écrits, le dogme ou le clergé (les horaires des messes, la laideur des synagogues, l’histoire de Marie elle-même...), on s’identifie d’autant mieux à son personnage qui se questionne, même lorsque l’on est athée. De ce film concept très personnel, on ressort avec plus d’incertitudes que de réponses, mais avec le sentiment d’une démarche d’une profonde honnêteté.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur