ATLANTIC BAR
Un ensemble de portraits tout juste bouleversant
Dans son bar d’Angers, Nathalie mène un peu tout le monde à la baguette. Pendant que son compagnon Jean Jacques s’affaire à servir les clients, elle s’occupe de ceux-ci, échange avec eux, les bichonne ou les provoque selon les moments. Mais derrière les sourires, les moments de complicité ou de fête, se cache le risque de la fermeture. Car le propriétaire du fond de commerce voulant vendre celui-ci, il leur a certes donné la priorité pour le rachat, mais ils ne disposent pas de la somme nécessaire…
Dans la petite ville de Camargue d’Arles, Fanny Molins a suivi la patronne d’un bar de quartier, Nathalie, jusqu’à la fermeture annoncée de celui-ci, soulignant avec tact et précision le rôle social de ce lieu où certains passent des heures chaque jour, interagissant avec patronne comme patron, ciments d’un lien plus proche de l’amitié que de l’utilité. S’intéressant un à un aux clients les plus assidus, elle capture ainsi, au détour d’une conversation plus ou moins agitée ou d’une confidence faite à une caméra devenue témoin, les motivations, les parcours, les blessures d’un ancien SDF que les patrons emmènent tous les jeudis à la pêche, d’un ancien braqueur assagi, d’un poète aimant l’improvisation…
Mais au delà des clients c’est surtout le personnage de Nathalie elle-même qui fascine, à la fois flamboyante et coquette, franche du collier et légère provocatrice, en colère et joyeuse, elle se livre peu à peu sur son passé d’alcoolique, la plaisanterie toujours au bout des lèvres. En permanence, elle parvient à provoquer le sourire, qu’elle se lance dans une improbable comparaison de l’alcoolisme et de l’addiction aux cigarettes, qu’elle s’emporte contre l’avidité supposée du propriétaire actuel ou peste contre les nouveaux qui prévoient des travaux, ou qu’elle charrie ses meilleurs clients. Derrière tout cela le nerf de la guerre, l’argent (on rêve ici d’une richesse hypothétique que les jeux de hasard pourraient amener), disparaît progressivement au profit de l’humain, persistant et essentiel.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur