Festival Que du feu 2024 encart

EGŌ

Un film de Hanna Bergholm

Un séduisant conte horrifique finlandais

Tinja, 12 ans, vit dans une maison, au sein d’un lotissement en bordure de forêt, avec sa famille que sa mère présente comme idéale. Une nuit, entendant des cris d’oiseau effrayants venant de la forêt, elle achève la pauvre créature, mais décide de ramener dans sa chambre l’étrange œuf qu’elle découvre juste à côté…

Ego 2022 film movie

Sortie directe en VOD, Blu-ray et DVD le 27 avril 2022

S’affichant principalement comme un film de passage à l'âge adulte, faisant d'une adolescente obéissante de 12 ans une rebelle en herbe, le film horrifique "Egō", venu de Finlande, se trouve être également une féroce satire sociale d'un milieu bourgeois. L’introduction est de ce point de vue particulièrement efficace, présentant une supposée « famille idéale », où la mère filme leur bonheur via perche à selfie, alimentant son blog titré « Notre super vie », avant d’achever en tordant le cou d’un oiseau qui a heurté une vitre et se traîne dans leur intérieur propret. Une attitude protectionniste et agressive vis à vis de l’extérieur de la cellule familiale, que sa fille, avec laquelle elle est à la fois autoritaire et perfectionniste (quand il s’agit par exemple de l’entraînement à la gymnastique…), s’empresse de reproduire en forêt lorsqu’elle parvient à rejoindre un oiseau dont les gémissements font froid dans le dos, achevant celui-ci à coups de pierre.

Pourtant c’est bien le mystérieux œuf récupéré à ses côtés, grandissant à vue d’œil et donnant naissance à une créature envahissante, prête à tout pour protéger celle qui lui est venue en aide, qui va enclencher chez Tinja une transformation de fond. Symboliquement caché dans le ventre d’un ours en peluche rose (un signe extérieur d’innocence), cet œuf devient une belle parabole sur l'affirmation de soi et la perte de l’innocence, le personnage étant mis de manière abrupte face aux arrangements incessants du monde adulte, la mère allant même jusqu’à la mettre dans certaines confidences dont elle se serait bien passé. Car derrière la façade d'une famille type (un papa, une maman, une fille, un fils) vivant dans son lotissement boisé tranquille, se cachent finalement bien des compromissions.

Usant de principes de mise en scène propres à créer l’inquiétude ou les sursauts (une éclosion observée depuis une armoire, utilisant le miroir comme filtre avec une réalité effrayante...), Hanna Bergholm s’amuse également avec la répulsion provoquée par la créature aussi bien en terme d’apparence (squelettique, décharnée, déplumée, à la dentition anarchique…) que de comportement (elle mange notamment le vomit de sa protectrice… autre symbole de ce qui est « dur à avaler » et dont elle se serait bien débarassé). Elle manie aussi avec un certain aplomb un humour noir très nordique (le père ému face à des traces de sang... qu’il prend pour les premières règles de sa fille). Centré sur le thème du monstre qui n'est peut-être pas forcément celui qu'on croit, "Egō" parvient à traiter à la fois d'égoïsme et d'opportunisme, du jeu des apparences et de la transmission, mais aussi de l’aspect ultra compétitif du monde dans lequel sont contraints d’entrer les adolescents. Alors aucune hésitation, découvrez comment le monde guimauve de Tinja se fissurera peu à peu, à l'image de la coquille de cet œuf qui grossit chaque jour au début de ce séduisant long métrage, reparti du Festival de Gérardmer 2022 avec le très convoité Grand Prix, mais aussi le Prix du jury jeunes.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

BANDE ANNONCE

Laisser un commentaire