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BLACK CRAB

Un film de Adam Berg

Une froide tension, mais quoi d’autre ?

Dans le cadre d’une longue guerre, Caroline Edh accepte de participer à une mission potentiellement suicidaire avec l’espoir de retrouver sa fille, qui a été enlevée par les ennemis plusieurs années auparavant. Il s’agit de patiner sur la mer gelée pour rejoindre une base militaire située sur une île afin d’apporter des capsules dont le contenu secret pourrait permettre de faire basculer le rapport de force…

Black Crab film movie

Sortie le 18 mars 2022 sur Netflix

Quand le film commence, on ne le sait pas encore mais la séquence inaugurale dit déjà tout de ce qu’il faut attendre pour la suite : d’une part une certaine efficacité à installer la tension et à faire corps avec l’héroïne (Noomi Rapace, perpétuellement sur le qui-vive), d’autre part un scénario qui ne cherchera ni à apporter des réponses ni à se préoccuper de la crédibilité de certaines situations ! Ainsi, "Black Crab" souffle constamment le chaud et le froid, installant un univers glacial séduisant mais déroulant un script paresseux.

Le métrage n’essaie donc jamais de faire comprendre les causes et les enjeux de cette guerre qui ravage la Scandinavie (si tant est qu’on soit en Scandinavie, car seule la langue suédoise nous permet de valider cette hypothèse) voire le monde (on ne sait rien, on ne sait même pas qui est l’ennemi), donnant l’impression constante d’arriver au beau milieu d’une série post-apocalyptique dont il faudrait avoir vu le début pour cerner l’histoire ! En fait, Adam Berg, réalisateur de clips pour A-ha, Kent ou The Cardigans, semble plus intéressé, pour son premier long, par l’esthétique et l’ambiance de son film que par l’intelligibilité de l’histoire. Les incohérences et les exagérations se succèdent ainsi au fil du récit, par exemple avec la mort étrangement instantané d’un personnage tombé dans l’eau glacée ou avec les nombreuses scènes montrant les protagonistes patiner dans la lumière alors que leur supérieur leur avait pourtant ordonné très explicitement de se déplacer la nuit ! De même, le flou est permanent, rien ne permet de connaître le passé de l’héroïne (les quelques flashbacks sont purement sensoriels), pas mêmes les raisons pour lesquelles elle est choisie pour cette mission (est-ce une ancienne championne de patinage de vitesse ?).

En adaptant un roman de Jerker Virborg, Berg et son coscénariste, Pelle Rådström, se focalisent sur le côté survival et sur l’espoir fou de l’héroïne de retrouver sa fille, ce qui la pousse à être prête à tout, quitte à se montrer insensible à la souffrance des autres. "Black Crab" aurait pu devenir une sorte de thriller métaphysique, interrogeant par exemple les limites éthiques entre protéger ses proches et mettre en danger autrui. Mais le film se perd dans l’immensité de son décor et dans celle de son univers sous-développé. Il faut ainsi se satisfaire de la fluidité des scènes de patinage (a-t-on déjà vu des personnages patiner aussi souvent en-dehors des films de hockey ?) et, surtout, de la tension permanente, qui est accentuée par une musique oppressante digne d’un film de Denis Villeneuve, avec un côté synthé 80’s en plus (la BO est signée par un groupe inconnu : Dead People). Malheureusement, si "Black Crab" n’est pas un navet, cela ne suffit pas à en faire un bon film.

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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