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HAUTE COUTURE

Un film de Sylvie Ohayon

Une accumulation de clichés bienveillants

Alors qu’elle se rend à son travail, Esther se fait voler son sac par Jade et Souad. Dans le sac, elles découvrent une étoile de David. Pour éviter que cela leur porte malheur, Jade décide alors de rapporter le bijou à Esther. Celle-ci prend alors la jeune fille sous son aile en lui proposant de devenir stagiaire à la Maison Dior où elle est première main…

Haute couture film movie

À la vue de l’affiche et la bande annonce, tout porte à croire que "Haute Couture" va nous transporter presque deux heures durant, dans le quotidien aussi magique que besogneux des petites mains qui font l’excellence de la mode française. Malheureusement, ce sujet pourtant passionnant n’est qu’un prétexte à un tout autre discours : celui visant à démontrer que malgré les différences de chacun, le plus important c’est la fraternité. Certes, en ces temps troublés par des courants d’idées nauséabonds, un tel message républicain est essentiel, encore faut-il l’exprimer avec justesse. Et c’est là que le bât blesse.

En effet, pour appuyer son message, Sylvie Ohayon multiplie les clichés en balayant tous azimuts les tensions qui empoisonnent notre société actuelle. Tout d’abord, dans un souci d’égalité, elle aligne les signes ostentatoires religieux. Esther tient plus que tout à son étoile de David, Jade bien que d’origine maghrébine par son père a une mère bigote qui collectionne les croix dans son appartement. Croix que l’on retrouve bien voyante au cou de Catherine, seconde main chez Dior. Pas de signe musulman visible, mais la gentillesse et la dévotion de la famille de Souad à l’égard de Jade et sa mère font le job. On aurait aimé un personnage ouvertement athée dans ce panel de la société française, mais ne nous égarons pas.

Ensuite pour bien dénoncer tout délit de faciès, la réalisatrice insiste lourdement sur les parcours « non attendus » de ses protagonistes. Jade tente de racheter ses larcins en embrassant les pieds de la vierge. Catherine, avec son carré blond sage a grandi dans la même ville de banlieue que Jade, alors qu’Abdel, a toujours vécu dans le 12e arrondissement de Paris et est une petite main de la couture hétéro. Par contre, Sephora l’amie transgenre de Jade, se fait traiter inopinément de « travelo » par une dame honorable qui, voyant que celle-ci n’apprécie guère, s’exclame qu’il y en a marre du politiquement correct. Comme si par cette petite anecdote incongrue, la réalisatrice voulait excuser son discours un peu trop bien-pensant.

Au final, cette multitude exagérée de démonstrations bienveillantes finit par agacer et étouffer un récit, somme toute, dépourvu d’originalité et peu crédible. Lyna Khoudri n’arrive pas à convaincre en rebelle imprévisible. Quant à Nathalie Baye, l’addiction exagérée de son personnage pour le sucre la cantonne derrière sa bonbonnière une grande partie de l’histoire. Les seuls moments où les protagonistes se dévoilent sont si prévisibles qu’ils ne provoquent que peu d’émotion. Ne reste alors, que quelques rares moments où, dans la pièce immaculée de l’atelier, on découvre les astuces et superstitions de ces petites mains si précieuses aux grands couturiers. Quel dommage que ce métier fascinant ne soit ici que le décor d’un film maladroit.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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