DE L'OR POUR LES CHIENS
Amour de vacances et jeune femme en devenir
Esther a 17 ans. Terminant sa saison estivale dans les Landes, où elle vend des glaces, elle se laisse aller à ses pulsions. Elle tombe du coup amoureuse d’un garçon, Jean, dont elle découvre qu’il baise aussi avec d’autres. Et lorsque celui-ci repart pour Paris, elle se met en tête de le rejoindre…
La force de ce premier long métrage d’Anna Cazenave Cambet, sélectionné à la Semaine de la critique de Cannes 2020, est sans doute d’envelopper son personnage principale (Tallulah Cassavetti, formidable), une jeune fille plutôt naïve, confrontée à ses propres pulsions, dans un écrin lumineux, dont elle ne se défait jamais. Confondant sexe et amour, Esther, son personnage, a tout d’une jeune fille en fleur, s’adonnant librement à des ébats sur la plage dans la scène d’ouverture avant de confier en voix-off à son journal intime les détails de ses « coups » comme ses fantasmes. Une rapide introduction, portée sur la sensualité, qui met cependant en évidence la solitude de la jeune fille, entre une mère lointaine à laquelle elle laisse des messages sans retour, et un amant pour qui elle n’est qu’un amour de vacances.
En cela, "De l’or pour les chiens" constitue un beau film sur la perte des illusions de jeunesse, marquant une indépendance subie et transformant rapidement le périple d’Esther en errance, alors qu’une scène dans un bar, baignée de musique électro et d’une lumière bleue, vient servir de pivot. Une scène qui résume d’ailleurs la situation même de la jeune femme : une quasi inconscience de son statut de femme (presque) adulte et un besoin candide d’affection et de lien. Quant à la deuxième partie du film, située dans un couvent, elle permet de confronter l’héroïne à un choix de vie décisif, entre ouverture au monde et aux autres, et retrait face à une société où la femme se doit de s’affirmer face à une image façonnée (objet de désir, injonction à ne pas vieillir...). Le travail sur le contraste (couleurs comme lumière) est y saisissant, et affirme déjà la patte d’une réalisatrice à suivre.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur