LA TERRE DES HOMMES
Position dominante
Constance, fille d’agriculteur, a pour projet de reprendre l’exploitation de son père, aidée par son fiancé, Bruno. Elle propose de nouvelles façons de travailler, et veut rejoindre le programme des « jeunes agriculteurs ». Elle s’adresse alors à la coopérative, dont l’un des membres influents propose de l’aider à obtenir les finances dont elle a besoin. Mais ce dernier est aussi attiré par elle et, alors qu’ils sont seuls, tente de l’embrasser…
Sélectionné à la Semaine de la critique de Cannes 2020, "La Terre des Hommes" s’inscrit dans tout un mouvement récent de films pointant la précarité grandissante du métier d’agriculteur, entre conditions de travail impossibles et prix de vente qui les laissent exsangues. Cela a donné des films poignants, tels "Petit Paysan" ou "Au nom de la terre", des films puissants et angoissants comme récemment "La Nuée", ainsi que des comédies ratées à l'image de "Roxane" ou "Normandie Nue". Le deuxième long métrage de Naël Marandin, après "La Marcheuse", se classe plutôt dans la première catégorie, tout en prenant comme personnage central une femme et déployant en superposition une histoire de harcèlement sexuel.
Le film s’ouvre sur une scène de ventes aux bestiaux posant la détresse financière dans laquelle se trouve l’exploitation du père, la vente des plus beaux bestiaux ne permettant pas de vivre. Évoquant non seulement les notions de rendement qui leur font perdre de vue leur objectif premier, mais aussi la position dominante de certains agriculteurs dans les coopératives, le scénario développe une réflexion sur la place de la femme dans le monde agricole, tout en questionnant au final sur l’attitude à adopter pour ne pas être déconsidérée. L’abus de pouvoir est rapidement caractérisé, Naël Marandin filmant un premier baiser dans la souffrance et le rejet, tandis qu’il assume le contraste avec la douceur des moments entre elle et son fiancé, toujours plus joyeux et surtout lumineux.
Diane Rouxel ("Les Garçons sauvages", "Volontaire") interprète ainsi avec ferveur et une pointe d’ambiguïté, Constance, personnage à la fois ambitieux et inflexible, submergé par l’impérieuse nécessité de réussite du projet qu’elle porte comme celle de ne pas se pardonner un certain manque de courage. Finnegan Oldfield ("Marvin", "Les Cowboys") est Bruno, le fiancé, aussi complice que déboussolé et peu capable de l’épauler. Tandis que Jalil Lespert ("Le Promeneur du Champs de Mars", "Premiers Crus") incarne Sylvain, l’homme profitant de sa position, dans toute la négation de ses différentes responsabilités. Ce trio remarquable est épaulé par Olivier Gourmet dans le rôle du père, tel un regard impuissant sur l’évolution d’un métier et de tout un écosystème local. Au final, "La terre des hommes", sous des allures un rien documentaire, dépeint un univers agricole impitoyable et souligne surtout l’indécence liée à une double emprise, économique comme physique.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteurBANDE ANNONCE
COMMENTAIRES
maggy
dimanche 24 octobre - 9h34
Je suis juste dérangée par l'impression que c'est seulement grace à cette histoire de harcèlement, et le chantage qu'elle arrive à mettre en place, que Constance va pouvoir réussir dans son métier d'agricultrice...