CRYPTOZOO
Foisonnant
Une femme et un homme font l’amour en forêt, autour d’un feu de camp. S’éloignant, nus, ils découvrent un mystérieux grillage qu’il décident de franchir. Il tombe alors nez à nez avec une licorne, qui empale l’homme. Achevant de tuer la licorne, la femme tente de porter le corps de l’homme et atterrit au milieu d’un ensemble de cages regroupant des animaux légendaires : griffon, chimère…
Mention spéciale du jury dans la section Generation 14plus du Festival de Berlin 2021, "Cryptozoo" est un film d’animation américain aussi foisonnant graphiquement que riche dans les thématiques qu’il aborde. Ancrant son étrange récit dans les années 60, Dash Shaw ("My Entire High School Sinking into the Sea") nous propose de suivre Lauren Grey, une vétérinaire spécialisée dans la sauvegarde des cryptides (des animaux légendaires dont l’existence - ou la non-existence - n’a jamais pu être prouvée, comme le Kraken, les Chimères, Pégase, le Minotaure, Cerbère, la licorne...), qu’elle tente de rassembler dans un zoo. Persuadée d’avoir croisé dans son enfance le Baku, une sorte d’animal à trompe bleu, mangeur de rêves, celle-ci tentera de le trouver avant l’armée, qui voit en lui une arme potentielle.
Abordant à la fois des questions de respect et d’exploitation de la vie animale (avec par moment une certaine ironie), de domination humaine sur la nature, de velléités belliqueuses, le film mêle une imagerie des années 60 (notamment des comics) et des éléments de mythologie. Phoebe, la comparse de Lauren Grey a ainsi globalement les caractéristiques de Méduse, l’une des gorgones (une chevelure faite de serpents vivants…). Mais par dessus tout, "Cryptozoo", par ses formes multiples (crayon, peinture brossée ou non, pochoirs, aquarelle, fond noir...), ses usages des superpositions, ses passages psychédéliques, affirme le dessin en média ultime de représentation de l'imaginaire.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur