VIVARIUM
Une œuvre étonnante et singulière, aux arguments pas suffisamment aboutis
Alors qu’il désespérait de pouvoir trouver un logement convenable, un jeune couple se voit offrir l’opportunité d’emménager dans un quartier résidentiel flambant neuf. Mais les apparences vont rapidement se montrer trompeuses…
Cette année, à Cannes, deux métrages ont fait particulièrement parler d’eux pour l’inventivité de leur postulat de départ, au point de les catégoriser comme des « films concepts » : "Little Joe" et "Vivarium". Dans le premier, une phytogénéticienne met au point une fleur permettant de rendre les gens heureux. Dans le second, un agent immobilier invite un jeune couple à venir visiter un nouveau lotissement d’apparence parfaite. Dans les deux œuvres, le symbolisme côtoie le surréalisme pour déployer une critique acerbe sur notre société et les aspirations matérielles qui habitent les générations actuelles. Si le film de Jessica Hausner se contentait d’une ambiance anxiogène, Lorcan Finnegan a lui décidé de pousser le curseur beaucoup plus loin, flirtant de manière bien plus frontale avec l’horreur et le thriller.
Dans un environnement aseptisé, où les nuages sont identiques et les paysages ressemblent à une œuvre de Magritte, les deux protagonistes se voient transformés en sujets d’une expérience, piégés dans un vivarium où l’archétype de la banlieue américaine pavillonnaire s’est transformé en une prison dorée. Pamphlet non dissimulé contre le conformisme ambiant et les normes admises, le projet séduit par ses qualités plastiques et cette symbiose maîtrisée entre la forme et le propos. Chaque saynète vient ainsi servir les velléités militantes de son auteur, détournant les modèles américains pour contredire la sacralisation de la parentalité ou de l’épanouissement par le travail. À ce titre, observer le personnage principal creuser toute sa vie un trou qui finira par avoir une utilité bien autre que celle imaginée est probablement l’une des plus belles idées scénaristiques de cet essai cinématographique.
>Affilié inéluctablement à la série matricielle "La Quatrième Dimension", référence qu’osera citer Charles Tesson, Délégué général de la Semaine de la Critique, durant sa présentation du film, "Vivarium" n’est malheureusement pas à la hauteur de son illustre modèle télévisuel. Car si l’atmosphère oppressante et la diatribe sont bien présentes, le métrage s’enferme dans une redondance dommageable, figeant ses héros dans un écrin trop froid, où l’impact émotionnel se retrouve annihilé par tant de surlignage inutile. Les acteurs font pourtant parfaitement le job, Imogen Poots démontrant une nouvelle fois que sa place est bien plus dans le ciné indé que dans des blockbusters façon "Need for Speed" ; mais il manque ce petit quelque chose qui aurait permis de transcender le concept initial. Les premières minutes nous promettaient une nouvelle pépite, on devra se contenter d’une pierre brute aux finitions hésitantes.
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur