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PREMIÈRE CAMPAGNE

Un film de Audrey Gordon

Devenir une journaliste politique pendant la campagne présidentielle

Astrid Mezmorian, pour sa première mission au service politique de France 2, suit Emmanuel Macron pendant toute sa campagne. Ce film est l’occasion de découvrir le candidat que personne n’attendait, mais aussi et surtout de découvrir le quotidien d’une jeune journaliste en période de campagne…

Première campagne documentaire image

Dans un dialogue en voiture à la toute fin du film, Astrid Mezmorian révèle un détail très signifiant : Emmanuel Macron quitte le gouvernement de François Hollande et son poste de Ministre de l’Économie le 30 août 2016. Elle intègre le service politique de France 2 le 1er septembre 2016. On l’envoie suivre Macron dans ce qui deviendra son premier déplacement officiel, ceci car les autres membres de l’équipe se concentrent sur les candidats "importants". On lui laisse la charge du jeune ambitieux.

Cette anecdote parle autant de chacun des deux protagonistes de ce documentaire. En effet, d’une part, ce film tente de lever le voile sur le candidat, pas encore le président, Emmanuel Macron. Sans jamais rentrer dans la théorie ou dans les promesses de campagne, c’est l’homme que tente de saisir la journaliste. D’autre part, et c’est sans doute la part la plus intéressante du film, ce documentaire se concentre sur le journalisme et plus particulièrement le journalisme politique.

Plein de petites pépites réflexives sur le système politique actuel, mais aussi sur le fonctionnement du journalisme politique contemporain, ce film aborde également au fonctionnement d’une rédaction et des journalistes eux-mêmes. Dans le film, Astrid Mezmorian est exploitée, on se permet de tout lui dire, de lui faire faire une quantité absurde de taches différentes avec une pression toujours plus grande. Ses rédacteurs en chef vont même couper dans ses articles, lui demandent de reformuler. Elle tente de garder la tête hors de l’eau, de garder le sourire et une motivation intacte, mais on la rabroue quand elle a le malheur de se plaindre ou d’exprimer une opinion. Rien de violent, elle n’a juste pas à se plaindre parce que « c’est sa première campagne », et que ce n’est qu’une fois tous les cinq ans.

Elle évolue dans un monde composée d’hommes, dans une grande solitude au sein de la foule qui s’agite. Elle tente de garder le sourire et de temps en temps, la féminité, qui n’est pas du tout placée au cœur du film, réapparaît dans une séquence assez dure. Comme un pied de nez, histoire de dire, et oui c’est une femme que vous avez en face de vous, une femme qui est émue quand sa mère lui dit qu’elle est belle, et qui s’inquiète d’avoir l’air laide quand on lui dit que son maquillage n’était pas bon. Ces scènes sont d’autant plus choquantes qu’elles montrent à quel point seules les critiques existent, et rarement les compliments, pour le travail effectué.

A noter aussi certains cadrages signifiants et images qui font sourire, comme le visage, énorme et surplombant, qui vient écraser la journaliste par la contre-plongée lors d’un meeting ; ou une image discrète d’Alexandre Benalla, quand Emmanuel Macron arrive en Corse.

Un très bon documentaire, riche et touchant, fait par une femme sur une femme dans un monde d’hommes. Un documentaire sur un monde politique où le long terme n’est plus que du court terme renouvelé et un monde où ni les politiques, ni les journalistes ne parlent du fond, car il n’y a pas la place et parce que ça n’intéresse pas.

Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur

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