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MERCENAIRE

Un film de Sacha Wolff

En terrain... conquis !

La France est un beau et grand pays, riche d’une culture et d’une diversité bienfaitrices. Mais la France ne se cantonne pas uniquement à l’hexagone, notre patrie recèle des trésors disséminés aux quatre coins du monde. "Mercenaire" rappelle à notre mémoire l’existence de territoires français dont on parle si peu en métropole : les Dom-Tom. Son héros, un grand gabarit joueur de rugby, vient de Wallis, une terre française située au beau milieu du Pacifique entre la Nouvelle-Calédonie et Tahiti. Une contrée peu vue au cinéma mais dont le réalisateur ne veut pas faire une particularité, d’où l’oubli volontaire de nous expliquer où cette île se situe exactement et pourquoi les Wallisiens parlent une autre langue. Pour le jeune cinéaste, la scène se passe en France ! On ne sous-titre pas le « Gers » quand Étienne Chatilliez envoie Michel Serrault à la campagne, on nous montre des oies… ! Pareil dans "Mercenaire", le réalisateur nous plonge dans la vie locale avec ses codes et lance rapidement son histoire autour du jeune Soane, un Wallisien qui est envoyé en métropole pour jouer au rugby et se construire une identité. Car vous l’aurez compris, il a beau être Français, Soane n’en demeure pas moins un étranger aux yeux des autres.

Ce premier long métrage de fiction, présenté à la Quinzaine des réalisateurs lors du Festival de Cannes 2016, est un uppercut bien senti qui aura d’ailleurs décroché un joli succès cannois, tant critique que public. Le film est une vraie tragédie grecque, intense, millimétrée qui cueille le spectateur par la puissance émotionnelle de son histoire et de son jeu d’acteurs. "Mercenaire" est un film sur une jeunesse au pays des brutes, où on demande à de grands gosses de grandir trop vite quand le combat que l’on mène ne se trouve pas que sur un terrain de sport. La bataille se joue au quotidien, surtout quand on a connu la violence à la maison et que l’on ne veut pas reproduire ce schéma vain. La finesse d’écriture est à saluer tout comme la direction d’acteurs. Les comédiens vont chercher au plus profond d’eux tantôt la rage, tantôt l’espoir, par ici la détresse et par là un peu de facétie. La caméra de Sacha Wolff imprègne l’écran de leur charisme. Loin d’être un film sur le rugby, "Mercenaire" plonge littéralement le spectateur entre les poteaux, au plus près des joueurs, grâce à une mise en scène immersive et n’hésite pas à écorner les belles vertus de ce sport pas aussi clean qu’il n’y paraît. C’est beau, c’est brut de décoffrage, c’est un premier film, c’est français et c’est à voir de toute urgence !

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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