TRAHISON
Une trahison ? Non. Une supercherie: oui !
Au Yemen, Samir Horne, un revendeur d’explosifs soudanais, se voit enrôlé par un groupe terroriste djihadiste. Ensemble, ils vont parcourir l’Europe et l’Amérique du Nord pour organiser une série d’attentats visant les Etats-Unis, mais une cellule spéciale du FBI enquête justement sur ce fameux Samir…
Voilà encore un film de contre-espionnage américain avec la panoplie FBI, agent infiltré, Patriot Act, services d’intelligences et de sécurité nationale sur (oh ! grande surprise !) le terrorisme islamiste. Dans cet imbroglio international rempli de raccourcis scénaristiques, la question est de savoir jusqu’à quel point on peut aller pour ses idéaux et croyances. Question que le film ne fait d’ailleurs qu’éluder pour ne laisser place qu’a de l’action superficiellement teintée de rares, mais quelques fois pertinentes réflexions et comparaisons entre Islam et Christianisme.
Le propos est ainsi noyé pour s’attacher à l’enquête fédérale et nous montrer les vilains terroristes organisant leurs attentats en enrôlant de fervents musulmans. C’est bien dommage, car si le scénariste s’était plus concentré sur le versant psychologique que sur celui de l’action et d’une fausse intrigue, le film aurait pu estomper son penchant très conformiste hollywoodien. En effet, malgré ses vaines tentatives pour masquer son côté très manichéen, Trahison stigmatise tout de même profondément la religion musulmane.
Malheureusement, même en occultant le sujet du film, la forme ne rattrape même pas le fond. Cinématiquement parlant, la mise en scène est exaspérante et ne sert en rien le propos du film. La réalisation est bourrée de tics de clippers avec d’intempestifs et impossibles mouvements de caméra. Les transitions flashies n’ont qu’une futile utilité : flatter l’œil pour peu que l’on soit un tant soit peu impressionné par ce type de mise en scène. On a même parfois l’impression d’assister à des séquences dont l’unique but est de faire du style (cf. Samir prenant le métro londonien). Alors forcément, ce genre d’effets passe tout de suite pour ringard et inapproprié lorsqu’on ne leurs trouve aucune justification scénaristique.
Les personnages principaux (interprétés par Guy Pearce, Don Cheadle et Saïd Taghmaoui) n’ont guère d’épaisseur : un flic diplômé en théologie pour rejeter deux ou trois idées reçues sur l’Islam balancées juste avant par son primitif de collègue ; un musulman soudanais, enrôlé par le FBI pour infiltrer un groupe terroriste, qui est à peine tiraillé par les tueries qu’il est obligé d’organiser pour préserver sa couverture et enfin, un fidèle djihadiste persuadé que chaque attentat est justifié. On en vient à se demander si de plus grands acteurs auraient pu sauver ces personnages tellement creux… Alors on ne s’étendra même pas sur les rôles secondaires qui sont carrément réduits à l’état de vulgaires accessoires. Pour couronner le tout, les ficelles scénaristiques et psychologiques sont prévisibles dès les vingt premières minutes et, fatalement, on finit par péniblement s’ennuyer.
Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur